Un rapport publié ce mercredi 5 juin dans la revue «Earth System Science Data» par une soixantaine de chercheurs de renom alerte sur une hausse des températures de «0,26°C en 2014-2023», de quoi menacer l’objectif de limiter le réchauffement bien en dessous des 2°C.
Le réchauffement climatique engendré par l’humanité à un «rythme sans précédent», avertit une étude scientifique

La fenêtre pour limiter à 1,5°C la hausse des températures est déjà presque fermée, alertent des dizaines de chercheurs renommés dans une étude parue ce mercredi 5 juin. «Le réchauffement causé par l’homme a augmenté à un rythme sans précédent dans les mesures instrumentales, atteignant 0,26°C en 2014-2023», affirment les scientifiques. Ce sombre constat, publié dans la revue Earth System Science Data, est le fruit du travail de près d’une soixantaine d’experts qui s’appuient sur les méthodes du Giec, les experts climat mandatés par l’ONU.

Par rapport à l’ère préindustrielle, ce réchauffement d’origine humaine a atteint 1,19°C sur les dix années observées. Soit une nette augmentation par rapport aux chiffres de la dernière étude, publiée il y a un an (+1,14°C sur 2013-2022). Pour la seule année 2023, le réchauffement attribuable à l’activité humaine a atteint 1,31°C. Le réchauffement total observé a lui atteint 1,43°C – car la variabilité naturelle du climat a également joué, à commencer par le phénomène El Niño, qui a contribué aux records de chaleur depuis des mois.
Décennie décisive

Cette publication intervient au moment où des représentants du monde entier sont réunis à Bonn pour faire avancer les négociations climatiques avant la COP29 prévue à Bakou en fin d’année (11-22 novembre). Et pour cause, les scientifiques entendent fournir des données à jour chaque année pour nourrir les négociations des COP et le débat politique, alors que la décennie actuelle est jugée décisive pour sauver les objectifs de l’accord de Paris de 2015, qui ambitionne de contenir le réchauffement bien en dessous de 2°C et si possible à 1,5°C.

Le réchauffement est le fruit des émissions de gaz à effet de serre – causées majoritairement par l’utilisation massive des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) – qui se situent à des niveaux records : quelque 53 milliards de tonnes d’équivalent CO2 par an sur 2013-2022. Elles atteignent même 55 milliards pour l’année 2022. Un autre phénomène a également joué, soulignent les scientifiques : un moindre refroidissement occasionné par les particules polluantes dans l’air, qui réfléchissent le soleil et permettent la formation de certains nuages.

Le budget carbone résiduel – la marge de manœuvre, exprimée en quantité totale de CO2 qui pourrait encore être émise tout en gardant 50 % de chances de limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C –, lui, est en train de fondre. Ce «budget» n’est plus que de l’ordre de 200 milliards de tonnes, l’équivalent d’environ cinq années d’émissions au rythme actuel, contre encore 250 milliards dans la dernière édition de l’étude il y a un an.
«Un peu d’optimisme»

«C’est une décennie critique, avertissent les scientifiques. On pourrait s’attendre à ce qu’un réchauffement mondial de 1,5°C soit atteint ou dépassé dans les dix prochaines années.» Néanmoins, l’auteur principal de l’étude, Piers Forster, de l’université de Leeds, l’affirme, le rapport contient tout de même «un peu d’optimisme». «C’est aussi la décennie où on pourrait s’attendre à ce que les émissions mondiales atteignent leur pic et commencent à décliner substantiellement», souligne le rapport. Malgré les niveaux records atteints, le rythme d’augmentation des émissions de CO2 a en effet ralenti cette décennie comparé aux années 2000.

Mais l’optimisme reste chiche, les émissions de gaz à effet de serre «augmentent toujours». Et l’un des auteurs scientifiques, Pierre Friedlingstein, de l’université d’Exeter, d’assener : «Il faut qu’elles descendent à zéro émission nette.»

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