Guerre

16 Mar 2025

L’Ukraine à vendre : quand la paix devient un prétexte au pillage des ressources naturelles

Derrière le cessez-le-feu se cache une nouvelle bataille : celle pour la richesse minérale considérable de l'Ukraine. S'agit-il de paix, ou simplement d'une nouvelle exploitation d'un pays dévasté par la guerre ?

Le paysage politique international vient d’être bouleversé par l’annonce d’un accord de cessez-le-feu entre la Russie et l’Ukraine, facilité par Donald Trump. Ce revirement marque un changement radical dans la politique de l’ancien président américain, qui plutôt que de maintenir un soutien inconditionnel à ses alliés occidentaux, adopte désormais une posture plus transactionnelle. Cette transformation a ébranlé la confiance de nombreux partenaires internationaux qui voient désormais la politique étrangère américaine comme un terrain incertain où les alliances sont dictées par des intérêts économiques immédiats plutôt que par des principes de solidarité stratégique.
 
Mais cette paix, obtenue sous l’égide de Trump, a un prix : les ressources minières de l’Ukraine. Le rôle des matières premières dans ce processus ne peut être ignoré. Alors que l’Ukraine tente de se relever d’un conflit dévastateur, l’exploitation de ses vastes richesses naturelles est devenue une monnaie d’échange pour obtenir une aide et des garanties de soutien.
 
L’Ukraine, un trésor minéral convoité
 
L’Ukraine est une mine d’or pour les industries stratégiques. Le pays possède 21 des 30 matériaux que l’Union européenne considère comme des « matières premières essentielles », ce qui le place au centre des convoitises internationales. Parmi ces ressources figurent les terres rares, notamment le scandium (Sc), l’yttrium (Y), le lanthane (La), le cérium (Ce), le praséodyme (Pr), le néodyme (Nd), le prométhium (Pm), le samarium (Sm), l’europium (Eu), le gadolinium (Gd), le terbium (Tb), le dysprosium (Dy), l’holmium (Ho), l’erbium (Er), le thulium (Tm), l’ytterbium (Yb) et le lutétium (Lu). Ces éléments sont essentiels pour la fabrication de technologies avancées, notamment dans les secteurs des énergies renouvelables et de l’aérospatiale.
 
L’Ukraine détient également environ 5 % des réserves mondiales de ces matériaux et dispose d’environ 450 000 tonnes de lithium, une ressource cruciale pour les batteries des véhicules électriques. Cependant, l’exploitation de ces ressources, bien que potentiellement bénéfique pour l’économie du pays, pose d’importantes questions environnementales et stratégiques.
 
L'Ukraine est une mine riche en éléments essentiels pour l'industrie. De plus, c'est un pays européen et un allié de l'Occident—une caractéristique qui attise la convoitise des puissances occidentales, leur permettant de le rançonner en toute tranquillité !
 
L’impact environnemental de l’exploitation minière en Ukraine
 
L’extraction des terres rares et du lithium est une activité hautement polluante. Elle entraîne :
 
La contamination des sols et de l’eau : Les produits chimiques utilisés pour l’extraction s’infiltrent dans les nappes phréatiques, mettant en danger la santé des populations locales et la biodiversité.
 
Une forte émission de CO2 : L’exploitation minière repose sur des processus énergivores, alimentés en grande partie par des énergies fossiles.
 
La destruction des écosystèmes naturels : La déforestation et l’extraction à ciel ouvert bouleversent les habitats naturels et menacent des espèces endémiques.
 
Alors que l’Ukraine sort d’un conflit qui a déjà ravagé son territoire, le lancement précipité de l’exploitation minière sans cadre écologique strict pourrait plonger le pays dans une crise environnementale aux conséquences irréversibles.
 
Un enjeu géopolitique déguisé en engagement écologique
 
Si la transition énergétique est souvent invoquée pour justifier cette ruée vers les terres rares ukrainiennes, l’arrière-plan géopolitique ne saurait être ignoré. La Chine contrôle aujourd’hui plus de 80 % du marché mondial des terres rares, ce qui pose un problème stratégique majeur pour les États-Unis et leurs alliés. Trump, qui s’est illustré par des politiques anti-environnementales sous son premier mandat, cherche désormais à diversifier les sources d’approvisionnement en dehors de la Chine. Mais cette posture est contradictoire : comment un gouvernement qui promeut le retour aux énergies fossiles peut-il prétendre œuvrer pour un approvisionnement en minerais stratégiques destinés aux technologies vertes ?
 
De plus, les investisseurs hésitent à s’engager dans un pays toujours instable, où la reconstruction exigera des années et où les risques économiques et sécuritaires demeurent élevés. L’exploitation des ressources minières ukrainiennes pourrait ainsi retomber entre les mains de multinationales peu scrupuleuses, entraînant des conditions de travail précaires et une destruction accélérée des écosystèmes.
 
Pourquoi la France change-t-elle de position ?
 
Un autre acteur attire l’attention : la France. Après avoir fermement soutenu la poursuite du conflit et appelé à la résistance ukrainienne, Paris semble aujourd’hui se ranger du côté des partisans du cessez-le-feu. Pourquoi ce revirement ?
 
La réponse pourrait se trouver dans les ambitions énergétiques françaises. Avec un programme de construction de 14 nouveaux réacteurs nucléaires, la France a un besoin urgent de garantir son approvisionnement en uranium et autres matériaux critiques pour son industrie énergétique. Depuis le coup d’État au Niger, son principal fournisseur d’uranium, Paris doit explorer de nouvelles pistes. L’Ukraine, avec ses ressources minières diversifiées, représente une alternative précieuse. Ce pragmatisme économique, sous couvert de diplomatie pacifiste, met en lumière les contradictions profondes des discours officiels.
 
Une paix au prix de la planète ?
 
Si la fin du conflit en Ukraine est une nécessité humaine et politique, elle ne doit pas être une excuse pour précipiter l’exploitation irréfléchie des ressources naturelles. Un véritable processus de reconstruction doit inclure une planification écologique stricte, sous peine d’ajouter une catastrophe environnementale à la tragédie humaine déjà en cours.
 
L’accord de Trump, loin d’être un geste altruiste, illustre une fois de plus comment les puissances mondiales placent leurs intérêts économiques au-dessus des préoccupations écologiques. L’Ukraine, déjà victime de la guerre, risque d’être la proie d’une nouvelle bataille, celle de l’exploitation effrénée de son sous-sol. Pour éviter ce scénario, il est impératif que les activistes écologistes et la société civile s’impliquent activement dans la surveillance de ces projets, afin que la paix ne soit pas synonyme d’un nouvel écocide.
 
Les questions environnementales doivent être au cœur des négociations de paix, sans quoi nous ne ferons que déplacer le champ de bataille des tranchées vers les mines.

 


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