Les impacts du tabac sur l’environnement
Les impacts sanitaires du tabac sont bien documentés depuis des décennies, ceux sur l’environnement demeurent méconnus et font l’objet d’une attention croissante. En mai 2022, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) avait publié une évaluation des conséquences environnementales de la production et de la consommation de tabac dans le monde. Tandis que le nombre de fumeurs diminue en France, l’enjeu écologique du tabac semble émerger comme un motif de refus de la cigarette chez les jeunes. Amélie Eschenbrenner, chargée de la communication du Comité national contre le tabagisme (CNTC) le pense : « l’aspect environnemental permet de sensibiliser davantage le grand public aux conséquences du tabagisme. Les jeunes se montrent plus sensibles aux crises écologiques actuelles. Ils se sentent moins concernés par des maladies qui leur semblent plus lointaines. »
Quels sont les impacts du tabac sur l’environnement ?
De la production à la consommation, le cycle de vie du tabac est source de pollution et de dégradation des écosystèmes. Ainsi, plus de 6 000 milliards de cigarettes sont produites chaque année dans le monde. Les mégots sont la première chose qui vient à l’esprit quand on pense à la pollution générée par la cigarette. Elles contiennent « des filtres plastique à usage unique. C’est l’un des déchets les plus répandus au monde. Or, il n’a aucune utilité sanitaire. Le filtre a été inventé pour que le tabac n’entre pas dans la bouche et afin de séduire un plus large public », remarque Amélie Eschenbrenner. Le filtre, fabriqué à partir d’acétate de cellulose, contient de nombreux éléments chimiques différent et met une douzaine d’années pour se décomposer. Amélie Eschenbrenner estime que « en communiquant sur la décarbonation de ses activités et la récupération des mégots, l’industrie du tabac fait du greenwashing. Les cigarettiers essayent d’occulter leurs responsabilités dans la dégradation de l’environnement, en mettant la responsabilité du consommateur en avant sur la question des mégots et en créant des campagnes de sensibilisation à ce sujet qui leur sont destinées. »
Le tabac = 0,2 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre
Il ne faut pas négliger l’impact environnemental de la culture du tabac pratiquée sur 5,3 millions d’hectares dans le monde. Selon l’OMS, la culture du tabac génère 84 millions de tonnes de CO2, soit 0,2 % du total des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Une pollution équivalente à ce que rejette la Belgique. Le tabac repose grandement sur une monoculture intensive. Elle consomme beaucoup d’eau, il faut 3,7 litres d’eau pour une cigarette. Cette agriculture utilise aussi 185 000 tonnes de pesticides chaque année au niveau mondial. L’épandage de ces pesticides expose à la fois l’environnement, les cultivateurs et les populations locales à des risques sanitaires. Enfin, chaque année, 200 000 hectares de forêts sont remplacés par des champs de tabac.
Les dérives d’une industrie pointée du doigt depuis des décennies
Les experts de la lutte contre le tabac avertissent sur les tentatives du secteur de verdir son image et de miser sur les nouvelles formes de consommation. En effet, en proposant des alternatives, qui remplaceront peut-être à terme la cigarette manufacturée, les tabatiers espèrent ainsi supprimer l’image du mégot, et donc du déchet associé à la clope. C’est aussi un moyen de séduire la jeunesse. Pour cela, ils misent sur de nouveaux produits comme le tabac liquide ou chauffé et les réseaux sociaux. Cependant, ces alternatives n’en demeurent pas moins nocives pour la santé et génèrent de nouvelles formes de déchets et de pollution. En France, 75 000 personnes meurent chaque année à cause du tabac. Ce chiffre dépasse les 8 millions dans le monde.
Le professeur Yves Martinet, président du CNCT (Comité National Contre le Tabagisme) et chef du service pneumologie au CHU de Nancy parle de : « pandémie industrielle », c’est-à-dire un risque sanitaire entretenu par un secteur d’activité au nom de ses intérêts économiques et au détriment de la santé publique. Ce spécialiste le rappelle : « on ne sait pas à quel point fumer est dangereux ». Il fustige les méthodes de l’industrie, qu’on retrouve aussi dans le lobbying du pétrole, des pesticides ou de l’agro-industrie sur la malbouffe : « aux États-Unis, ce sont les mêmes cabinets d’avocats qui défendent l’industrie du tabac et des énergies fossiles. On retrouve toujours les mêmes stratégies et les mêmes arguments. D’abord s’opposer à toutes les réglementations, puis négocier pour gagner du temps, réduire le porté des mesures d’intérêt général et enfin faire en sorte qu’elles ne soient pas appliquées ». Il cite l’exemple de la vente de tabac aux mineurs, interdire en France, mais très répandue dans les faits puisque l’âge de la première cigarette tourne autour de 14 ans.
L’importance de la sensibilisation aux questions de santé publique est plus que jamais importante. Yves Martinet de conclure sur le rapport de force inégal : « l’industrie du tabac a un mauvais dossier, mais possède beaucoup de moyens et d’argent grâce à un produit qui tue mais se vend bien. Nous, on a un bon dossier, mais peu d’argent ».
Des actions au niveau mondial pour lutter contre le tabagisme et préserver l’environnement
« On m’a toujours dit que le meilleur déchet, c’est celui qu’on ne produit pas. J’ai donc deux objectifs convergeant : se débarrasser du filtre et faire en sorte que les gens ne fument plus ». Il explique que les associations de lutte contre le tabagisme demandent que les filtres soient considérés comme des déchets plastiques à usage unique. La finalité est qu’ils soient pris en compte dans un traité visant à interdire le plastique dont les négociations ont débuté l’an dernier à l’ONU. Il rappelle aussi l’existence d’une Convention-cadre de l’ OMS pour la lutte antitabac, qui est un texte contraignant qui prévoit notamment de remplacer les cultures de tabac par des cultures vivrières.
Source : goodplanet.info
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