La ville de Cannes, sur la côte d’Azur, imposera dès 2020 de limiter la teneur en soufre de leur carburant à 0,1% s'ils veulent continuer à accoster et débarquer leurs passagers. Une décision qui ira plus loin que ce qu'impose la loi.
Les bateaux de croisières, géants de la pollution de l'air

Le maire David Lisnard et la chambre de commerce et d’industrie Nice-Côte d’Azur, qui exploite le Vieux-Port de Cannes, ont signé une charte en ce sens avec le groupe américain Norwegian Cruise Line Holdings. Lequel représente pas moins de 40% environ du trafic à Cannes.

Une autre compagnie doit la signer prochainement. Les émissions de soufre sont limitées dès l’entrée dans la zone de pilotage, située derrière les îles de Lérins, archipel en face de la baie de Cannes. «Les compagnies refusant de signer cette charte se verront interdites, dès le 1er janvier 2020, de débarquer leurs passagers à Cannes»

Pourquoi c'est important

La pollution engendrée par ces géants des mers, qui mesurent plusieurs centaines de mètres de long et embarquent des milliers de personnes, est colossale.

Une ONG, Transports et Environnement, a publié une étude chiffrée et détaillée sans ambiguïté: en Europe, par exemple, les 47 navires de la compagnie Carnival [rapport en anglais] émettent... 10 fois plus d'oxydes de soufre (NOx) que l'ensemble des 260 millions de voitures en circulation dans tout le continent! Autrement dit, chaque navire émet chaque année autant de NOx que 2,8 millions de voitures.

Même ramené au nombre de passagers, la pollution est gigantesque, comme le rappelait France Nature Environnement dans cette vidéo:

Parmi les pays les plus touchés en Europe figurent la Norvège, l'Espagne, l'Italie, la France, la Grèce, le Royaume-Uni, le Portugal et le Danemark. Mais l'ensemble des pays côtiers sont affectés. 

Le gazole automobile est beaucoup moins chargé en soufre

Jusqu'ici, les émissions de soufre avaient déjà été limitées à 0,1% en mer du Nord, en mer Baltique et en Manche depuis 2015, sous la pression notamment des Scandinaves.

Le gazole, carburant utilisé par les voitures à moteur diesel - les plus répandues en France - ne doit pas contenir plus de 0,01% de soufre.

Les bateaux utilisent un carburant à la bonne teneur, ou un scrubber ou un système équivalent qui permet de neutraliser les gaz toxiques.

Cannes a donc choisi d'aller plus loin que ce que prévoit la loi: depuis 2015, celle-ci limite la teneur maximale en soufre dans le carburant des navires transportant des passagers à 1,5%, contre 3,5% pour les autres navires - sauf si l’escale dure plus de deux heures, auquel cas les navires doivent passer au diesel marin à quai, qui contient 0,1% de soufre au maximum.

En 2020, la quantité maximale de soufre dans le carburant des paquebots et ferries doit être ramenée à 0,5% - ce qui reste cinquante fois supérieur au gazole automobile. 

Une ristourne prévue pour ne pas faire fuir les croisiéristes 

Cannes est le 4e port de croisière français après Marseille, Ajaccio et Le Havre, et table sur plus de 400 000 touristes en escale cette année.

Les retombées directes et indirectes de la présence des croisiéristes pour la ville de Cannes sont estimées à quelque 56 millions d'euros - même si les visiteurs ne passent qu'en moyenne cinq heures dans les rues de la ville. En effet, beaucoup reviennent par la suite.

Le carburant, pour un exploitant de paquebot, représente jusqu'à 40% du coût global du navire. Les exploitants du port ont donc choisi de leur appliquer une réduction de 0,20 euro par passager sur les droits de port, afin de les encourager dans cette voie.

D'autres polluants mis à l'index

Selon l'ONG Transports et Environnement, l'Europe compte environ 200 paquebots de croisière. 

À eux tous, ils émettent de nombreux polluants: quelque 62000 tonnes de dioxydes de soufre chaque année, mais aussi 155000 tonnes de dioxydes d'azote et 10000 tonnes de particules fines.

Des chiffres colossaux à ajouter aux 10,3 millions de tonnes de dioxyde de carbone émises, un gaz à effet de serre, responsable du réchauffement de la planète.

Enfin, la dépense énergétique et le faible recyclage des déchets produits à bord sont aussi pointés du doigt. Plusieurs compagnies se sont engagées à les réduire, alors même que ces navires consomment pas moins de 3,267 millions de tonnes de fioul par an...

Source: republicain-lorrain.fr

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