Avec ses éoliennes offshore, la Chine prend pied en Méditerranée. Va-t-elle conquérir l’Europe ?
La Chine fait ainsi une entrée remarquée sur le marché européen de l’éolien offshore. Ces deux premiers succès commerciaux alertent les constructeurs européens qui ne pensaient pas être concurrencés aussi tôt dans leur « pré carré ».
Ironie du sort, c’est la faillite du turbinier allemand Senvion qui a permis à MySE de prendre pied dans les mers de notre continent. Senvion avait en effet obtenu la commande du développeur Renexia pour fournir les 10 éoliennes du parc offshore Beleolico projeté en face du port de Tarente, dans le sud de l’Italie.
Mais la mise en liquidation début septembre 2019 de Senvion a rebattu les cartes, et c’est finalement MingYang qui a remporté le marché de livraison des turbines de 3 MW de Beleolico, le tout premier projet offshore situé en Méditerranée. Selon le fabricant chinois, c’est également la première fois qu’un équipementier de son pays fournit des éoliennes pour le marché européen de l’offshore.
Beleolico aura une capacité de 30 MW et une production estimée à 58 000 MWh par an. L’entreprise néerlandaise Van Oord installe actuellement les premières fondations de type monopiles du parc. Son navire MPI Resolution est parfaitement adapté aux travaux en Méditerranée car il peut s’accommoder aux faibles profondeurs comme aux eaux plus profondes. Le fond marin de Beleolico varie en effet entre 4 et 18 mètres.
Un autre grand coup
Trois mois après avoir révélé cet été le développement d’une turbine offshore de 16 MW, MingYang a frappé en octobre de cette année un autre grand coup en annonçant l’obtention d’un nouveau contrat pour un projet éolien flottant, dans le nord de l’Europe cette fois. Le fabricant n’a pas divulgué le nom du futur parc ni celui de son client, en précisant seulement que la commande concernait un projet pilote développé par un acteur de premier plan de l’éolien offshore européen, à qui il fournira son modèle hybride de 11 MW. Celui-ci devrait être installé en 2023.
Selon un rapport publié récemment par le Global Wind Energy Council (GWEC), à peu près la moitié des nouvelles capacités éoliennes offshore installées dans le monde en 2020 ont été implantées dans les eaux chinoises, l’autre moitié étant située en Europe.
Au total, la puissance cumulée du parc éolien offshore mondial a atteint 35,3 GW à fin 2020, 70% de ces capacités étant concentrées dans les mers européennes. Sur la base des politiques annoncées, le GWEC estime que 235 GW de nouvelles capacités éoliennes offshore pourraient être déployées dans le monde au cours de la prochaine décennie, soit près de 7 fois le niveau actuel.
La bataille de l’éolien offshore
Le potentiel de développement de cette filière au large des côtes de notre continent est énorme, la Commission européenne ayant annoncé son ambition de porter la puissance éolienne offshore dans l’Union (hors Royaume-Uni donc) à 60 GW en 2030 et à 300 GW d’ici 2050. Quant au Royaume-Uni qui est actuellement le leader toutes catégories de l’offshore, avec près de 30% des capacités mondiales, il compte bien garder son avance.
Jusqu’à présent, les grands turbiniers européens que sont Siemens-Gamesa, Vestas et Nordex, n’étaient concurrencés dans leur pré-carré que par l’américain General Electric (GE). Mais après les récents succès de MingYang Smart Energy dans les appels d’offre européens, et l’annonce faite par le fabricant chinois du développement de la plus puissante éolienne du monde, ils ont certainement senti le vent du boulet. Réussiront-ils à faire face à la menace ? Il y a quelques jours, Siemens-Gamesa a déjà réagi en annonçant l’injection dans le réseau danois des premiers mégawattheures produits par son prototype de 14 MW au centre de test d’Østerild.
La bataille de l’éolien offshore bat son plein.