Interview de Gérard Filoche, ancien inspecteur du travail, syndicaliste et écrivain
Cette interview a été réalisée par Melania Giordano
Il est temps de mettre fin à la prolifération du plastique. Selon vous, quel est le succès jusqu'à présent de la France dans ce domaine ?
Sur la question une, la France produit 3,6 millions de tonnes de plastique et n'en recycle que 30%. C'est la mauvaise élève de l'Union européenne. Il faudrait réglementer les usages, fixer des normes aux industriels sur les emballages, revenir au verre et aux cartons.
Ces déchets sont encore dispersés dans la nature. Que faire ?
Il faut réduire l'usage du plastique. Quant à celui disséminé dans la nature il faut arrêter de s'en remettre aux villes ou aux associations. Il faut investir dans un plan de collecte des déchets au niveau gouvernemental, mettre en place une filière du recyclage des déchets et baisser la production.
Moins en consommer ! Campagnes de sensibilisations.
Les pouvoirs publics doivent se saisir de ce problème. On constate une augmentation des initiatives citoyennes : associations, établissements scolaires proposent des opérations de ramassage des déchets plastiques.
Or comme toute forme de bénévolat, cela ne suffit pas et pose un problème politique (ces engagements remplacent la puissance publique). Nos services publics doivent s’emparer du problème et nettoyer nos espaces envahis par le plastique, surtout dans les zones semi-rurales ou rurales.
On en consomme plus que dans beaucoup de pays développés. Faire comme l'Allemagne ou les pays scandinaves doit être possible.
Privilégier le yaourt familial à celui individuel par exemple, interdire les sachets individuels de madeleines ou gâteaux qui multiplient les emballages sans réelle utilité pour le consommateur, développer le vrac ...
Ceci suppose de s'attaquer aux industriels et aux distributeurs...
Arrêter avec l'obsolescence programmée et monter en gamme sur l'indice de réparabilité des nombreux produits (TV, ordis, téléphones...)
La pollution plastique étouffe le monde. Pourquoi les gouvernements des pays développés traitent-ils le tiers monde comme leur poubelle ?
Les capitalistes ont réussi à imposer un marché sur la taxe carbone (aujourd’hui autour de 85 euros la tonne de CO2).
Actuellement, il existe 21 marchés (bientôt 24 de plus). Il a été porté par le monde industriel qui préférait cette solution recourant au marché, plutôt qu'une simple taxe carbone. Les Nations unies ont défini un quota annuel. L’UE a mis en place son propre marché et défini les quotas par pays. Ils peuvent revendre leur quota s'ils en ont économisé et/ou en acheter s'ils en ont besoin. Mondialement, il est prévu de ne pas dépasser un quota mondial.
L’intérêt pour les pays du nord est d’économiser leurs quotas (donc s’ils peuvent en voyer leurs déchets aux pays du sud c’est tout bénef). D’autant plus que les pays du sud, peu développés industriellement, ne « dilapident » pas leurs quotas et peuvent en ajouter aux leurs.
Donc tout le monde est content ; les pays du nord paraissent vertueux et les pays du sud récupèrent la monnaie. Seule la terre (notre terre) continue à étouffer car ce système de marchés du carbone ne fait pas baisser la pollution (car l'émission des gaz à effet de serre ne baissent pas ou trop peu) mais se contente de spéculer sur un nouveau marché.
Le traité mondial contre la pollution plastique et les négociations internationales : des pays comme la Chine et les États-Unis ne respectent pas leurs engagements comme Accord de Paris. Le monde devrait s'unir contre ces pays. Qu'en pensez-vous ?
Il ne faut rien espérer des accords de Paris ou d'ailleurs car ils sont manipulés par les capitalistes qui ont effectivement pris conscience du problème du climat mais veulent le "régler" à leurs seuls profits (dans ces rencontres ce sont des communicants "Mc Kinsey par ex.", les think tank, les industriels qui gèrent et imposent le point de vue aux gouvernements). Vive le capitalisme vert !!
D'ailleurs un livre qui vient de sortir explique très bien tout cela fin du monde et petits fours (vidéo de 47 minutes).
Tant que les lapins n'auront pas d'historiens, l'histoire sera racontée par les chasseurs... Howard Zinn.
Cette réduction est portée par la Coalition pour la haute ambition, conduite par le Rwanda et la Norvège et composée d'une cinquantaine de pays, dont l'Union européenne, le Canada, le Chili et, depuis quelques jours, le Japon. Son espoir : "mettre fin à la pollution plastique d'ici à 2040".