C'est la hantise des angoissés de l'avion: les turbulences aériennes, ces mouvements d'air souvent brusques et irréguliers. Il y a quelques semaines les passagers d'un Boeing de la compagnie Singapore Airlines en ont fait l'amère expérience. L'appareil a plongé de 1800 mètres en quelques minutes, causant la mort d'un homme de 73 ans et une centaine de blessés. Les turbulences ont toujours posé des problèmes à l'aviation mais le changement climatique aggrave le phénomène
Comment la crise climatique aggrave les turbulences en avion?

Il y a trois types de turbulences. Les premières surviennent au-dessus des montagnes, les deuxièmes dans les nuages. Enfin, il existe des turbulences par ciel clair, plus difficiles à détecter. C'est sur celles-là que le réchauffement climatique a un impact.

L'effet du réchauffement climatique sur les turbulences est lié aux courants jet (ou jet-stream), des vents très forts qui, dans l'Hémisphère Nord, soufflent de l'Ouest vers l'Est. Ces vents apparaissent parce qu'il y a une différence de température en haute altitude entre les Tropiques, plus chaudes, et le Pôle Nord, plus froid.

« Avec le changement climatique, on a une intensification de cette différence de température, explique Mohamed Foudad, docteur en sciences de l'atmosphère et spécialiste des turbulences en ciel clair au CERFACS de Toulouse. Les tropiques se réchauffent et le Pôle est refroidi en haute altitude, donc plus on émet de gaz à effet de serre, plus cette différence de température augmente et donc modifie la structure des vents et les cisaillements de vents en haute altitude au niveau de vol des avions de ligne ».

Cela peut sembler étrange alors qu'on dit tout le temps que le Pôle Nord se réchauffe. En réalité, il se réchauffe à la surface du globe, mais très haut dans le ciel, l'air refroidit à cause du dérèglement du climat. Et ça, cela augmente la fréquence des turbulences modérées et sévères et cela fait passer certaines turbulences de modérées à sévères.

Bref, le phénomène se multiplie et s'intensifie et cela va continuer à l'avenir si nous ne réduisons pas nos émissions de gaz à effet de serre responsables du changement climatique.

L'Afrique du Nord particulièrement concernée

Les scientifiques ont montré que l'aggravation des turbulences en raison du réchauffement global se passe plutôt dans la zone subtropicale, c'est-à-dire « dans l'est de l'Asie, au Moyen-Orient, dans les Amériques, mais aussi sur toute l'Afrique du Nord », indique Mohamed Foudad.

Les avions arrêteront-ils de voler pour autant ? La réponse est non. « Les appareils d'aujourd'hui sont construits pour résister aux pires turbulences, même celles d'un climat plus chaud », assure le chercheur. Mais nous verrons plus d'incidents comme celui de la Singapore Airlines. Il pourrait y avoir des blessés, parfois, dans de rares cas, des morts, et ces turbulences aggravées représenteront, c'est sûr, des coûts supplémentaires pour les compagnies aériennes, car elles endommagent les avions.

Et ce n'est pas le seul effet du changement climatique sur l'aviation. Un autre exemple : les vagues de chaleur extrêmes compliquent aussi le décollage, car plus l'air est chaud, plus la portance de l'avion diminue. Il faut donc réduire le poids de l'avion avec moins de bagages ou moins de passagers, ou bien rallonger les pistes. Une sorte de retour de bâton alors qu'on sait que l'avion est très mauvais pour le climat.

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