Une note des Douanes diffusée la semaine dernière considère que les biocarburants fabriqués à partir de résidus d'huile de palme pourront bénéficier de l'avantage fiscal dont l'huile elle-même est privée à partir du 1er janvier.
Total : nouveau bras de fer autour de l'huile de palme

Les ONG dénoncent une stratégie de contournement.

LesEchos.fr. L'huile de palme, et son utilisation controversée pour produire des biocarburants, est au cœur d'une nouvelle polémique, à quelques jours de l'entrée en vigueur d'une mesure qui aura un impact déterminant sur le secteur. Les services des Douanes ont publié jeudi une note potentiellement favorable à Total, qui a démarré cet été la production de carburants à base d'huile de palme dans sa bioraffinerie de La Mède, près de Marseille. Et cela alors même que le Parlement vient de voter une mesure qui met des bâtons dans les roues du pétrolier français.

Dévoilée par Canopée, une association de lutte contre la déforestation, la note à destination des « fédérations professionnelles » explicite l'article de la loi de Finances qui entrera en vigueur en début d'année. Les carburants fabriqués à partir d'huile de palme « ne sont plus considérés comme des biocarburants à partir du 1er janvier ». En conséquence, ils ne bénéficieront plus d'une fiscalité allégée. « Toutefois, les biocarburants produits à partir de PFAD ne seront pas exclus » de la liste, et continueront à profiter d'une taxation favorable.

Un déchet ?

Les PFAD ? Il s'agit des distillats d'acide gras de palme. La note des Douanes considère que cette matière première est distincte de l'huile de palme elle-même. La subtilité n'est pas neutre, car Total entend incorporer des PFAD dans ses carburants produits à La Mède. Pour le groupe pétrolier, ils entrent dans la catégorie des « huiles résiduelles », par opposition aux huiles végétales vierges. Ils pourront donc être utilisés au-delà de la limite des 300.000 tonnes d'huile de palme par an qu'il s'est engagé à ne pas dépasser.

Les associations de défense de l'environnement ne décolèrent pas depuis qu'elles ont découvert l'existence de cette note. « C'est une stratégie de contournement de l'administration qui n'a aucune base légale, dénonce Sylvain Angerand, coordinateur des campagnes pour Canopée. Les PFAD ne sont pas des résidus, ce sont des coproduits liés au processus de fabrication de l'huile de palme. Ils sont valorisés à 100 % dans l'industrie cosmétique ou pour l'alimentation animale. Si on augmente la demande pour les PFAD, on augmente la demande pour l'huile de palme ».

Les PFAD « correspondent à la définition de résidus du droit européen », répond le ministère de la Transition écologique. Ils pourront donc être utilisés par Total au-delà de la limite des 300.000 tonnes d'huile, mais il faudra un arrêté ministériel pour fixer les critères de durabilité à respecter. « Cet arrêté ne sera pas pris sans débat, promet le cabinet de la ministre, Elisabeth Borne. Une concertation large et transparente se tiendra début janvier avec les acteurs économiques, les parlementaires et les associations environnementales ».

Des quantités limitées

La production mondiale de PFAD reste limitée, comprise entre 2,5 et 3 millions de tonnes par an selon le raffineur finlandais Neste, le raffinage de l'huile de palme ne générant que 3,5 % à 5 % de ce sous-produit. « Du fait de son acidité et des risques de corrosion associés, le PFAD ne peut être traité qu'en quantité très limitée par notre bioraffinerie de La Mède », précise-t-on chez Total.

La réglementation n'est pas partout la même en Europe, ce qui entretient l'ambiguïté. L'Agence norvégienne de l'environnement a par exemple reclassé le PFAD en sous-produit en 2016. La Suède a fait de même. La Finlande, en revanche, qui abrite Neste, l'un des plus gros producteurs de biodiesel, regarde ces acides gras comme des résidus.

Source: lesechos.fr

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