Et enfin glyphosate va interdire en France des 2022 ?
Après avoir annoncé son interdiction d'ici à 2022, le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner est finalement revenu sur ses propos en promettant seulement des «progrès significatifs». Edouard Philippe, de son côté, a demandé un rapport sur «les conditions d'un plan de sortie».
Le glyphosate, herbicide controversé, devrait bientôt être interdit pour tous les usages en France, agriculture comprise. C'est tout du moins ce qu'a annoncé ce lundi matin sur BFM-RMC le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner. «Le premier ministre a (...) arbitré pour faire en sorte que ce produit soit interdit en France, ainsi que tous ceux qui lui ressemblent et qui menacent la santé des Français, d'ici la fin du quinquennat», soit 2022, a-t-il déclaré au micro de Jean-Jacques Bourdin... Avant de minimiser ses propos en milieu de journée, en indiquant à l'AFP que le gouvernement «s'engageait à des progrès significatifs» d'ici 2022, pour tous les pesticides dont le glyphosate, en précisant qu'il «n'y a pas d'autre date arrêtée par le Premier ministre». «L'objectif est qu'on puisse trouver des produits de substitution d'ici la fin du quinquennat» a ajouté M. Castaner, sans donner de date-butoir pour un retrait.
"Le #glyphosate sera interdit en France pour tous les usages d'ici la fin du quinquennat" @CCastaner #BourdinDirect pic.twitter.com/0amOPMR50m
— RMC (@RMCinfo) 25 septembre 2017
Petit couac dans la communication gouvernementale donc. En effet, Matignon s'était montré nettement moins affirmatif que le porte-parole du gouvernement, ce matin, dans une annonce faite en parallèle. Les services du premier ministre ont simplement indiqué qu'Edouard Philippe avait demandé aux ministères de l'Agriculture et de la Transition écologique de présenter «les conditions d'un plan de sortie» du glyphosate dans un rapport, et ce «avant la fin de l'année». «Edouard Philippe a appelé dimanche Stéphane Travert et Nicolas Hulot pour déterminer la position du gouvernement sur ce sujet», a précisé Matignon à l'AFP.
Car les positions des deux ministères concernés divergent franchement. Vendredi, le ministre de l'Écologie, Stéphane Travert, avait proposé que la France prolonge de «cinq à sept ans» l'autorisation de l'usage du glyphosate, au lieu des dix ans proposés par la Commission. Nicolas Hulot, s'était quant à lui rendu sur les Champs-Élysées le même jour pour plaider les effets dangereux de l'herbicide, devant environ 250 agriculteurs en colère. Dans une interview accordée à Ouest-France , le ministre avait annoncé que la France «n'adoptera pas de mesure brutale à l'égard des agriculteurs», pour leur permettre de s'adapter.
D'après Matignon, une sortie progressive sera mise en place. Reste à en déterminer le calendrier... Ces déclarations interviennent alors qu'à l'échelle européenne, Bruxelles a proposé de renouveler pour 10 ans la licence d'exploitation du glyphosate dans l'Union Européenne, qui expire fin 2017. Début septembre, Matignon affirmait encore que la France voterait contre la reconduction pour les dix prochaines années du glyphosate à l'automne.
Les annonces imprécises sur ce dossier
ont déclenché une très vive réaction du principal syndicat agricole FNSEA. «Nicolas Hulot se sent prisonnier du vote de Ségolène Royal (l'ancienne ministre de l'Écologie a toujours considéré que cet herbicide devait être retiré du marché, ndlr)», commente Christiane Lambert, présidente de la FNSEA. «Il cherche une solution de sortie. Nous demandons au gouvernement d'avoir plus de cohérence dans ses décisions.» En effet, la France vient de signer avec le Canada un accord de libre-échange, le CETA, qui va autoriser l'importation en France de produits traités au glyphosate, alors qu'il serait interdit dans notre pays. Selon la FNSEA, il est «hors de question» que la France prenne une position unilatérale. En effet, à ce jour, elle serait le seul pays avec Malte, à s'opposer au renouvellement de l'autorisation de la molécule.
La présidente demande par ailleurs au gouvernement de reconsidérer l'avis de l'Anses (Agence nationale sécurité sanitaire alimentaire) qui ne classifie pas le glyphosate comme une molécule probablement cancérigène. «Nous rappellerons lors du conseil d'administration de l'Anses ce mardi au gouvernement de relire les conclusions des travaux tout à fait sérieux des scientifiques de cette agence», insiste Christiane Lambert.
Baisse de rendement pour les agriculteurs
L'enjeu est de taille pour la filière agricole. Le glyphosate est la molécule la plus utilisée en agriculture, et les agriculteurs la jugent indispensable pour «conserver l'excellence agricole française». Ainsi, l'institut Ipsos a mené une étude auprès de 904 agriculteurs et table sur un manque à gagner de deux milliards d'euros. Le retrait du glyphosate «entraînerait une baisse de rendement et donc un retrait des exportations, notamment pour les céréales autour de 1,06 milliard d'euros pour le secteur des céréales auxquels il faut ajouter 900 millions d'euros pour la vigne», indique l'institut de sondage.
C'est pourquoi Christiane Lambert invite Nicolas Hulot et Stéphane Travert à poursuivre la discussion sur les traitements phytosanitaires, dans une ferme d'avenir de la Marne d'ici fin octobre début novembre, juste avant le vote du comité des experts européen. Il doit se prononcer pour ou contre le renouvellement pour dix ans du glyphosate. Compte tenu des élections allemandes, il a en effet été repoussé d'un mois. Une aubaine pour le gouvernement qui aura plus de temps pour réfléchir à une position médiane, sans donner l'impression de reculer face à la pression de la rue. En attendant, les agriculteurs favorables à l'utilisation du glyphosate gagnent du temps!