« Au lieu d’assumer elle-même la responsabilité d’une politique agricole durable, la Commission renvoie la balle aux États membres », a indiqué Cem Özdemir sur Twitter lundi.
Crise alimentaire : selon un ministre allemand, la Commission fuit ses responsabilités

La Commission européenne laisse aux États membres le soin de prendre des décisions difficiles. C’est ce qu’a affirmé lundi (25 juillet) le ministre allemand de l’Agriculture, Cem Özdemir, après que l’exécutif européen a décidé d’assouplir les règles relatives à l’agriculture durable jusqu’en 2023.

La Commission européenne a annoncé vendredi soir qu’elle allait assouplir temporairement, pendant un an, certaines exigences environnementales inscrites dans la réforme de la Politique agricole commune (PAC), le programme de subventions agricoles de l’UE.

La décision d’accorder ces dérogations a pour objectif de favoriser l’augmentation de la production nationale alors que les marchés alimentaires mondiaux sont ébranlés par l’invasion russe en Ukraine.

« Au lieu d’assumer elle-même la responsabilité d’une politique agricole durable, la Commission renvoie la balle aux États membres », a indiqué M. Özdemir sur Twitter lundi matin, ajoutant que les dérogations devaient donc être examinées avec prudence.

Habituellement, chaque État membre est tenu de lier une partie des subventions agricoles de l’UE qu’il verse au respect d’exigences de conditionnalité.

Les dérogations accordées par l’exécutif européen signifient que, jusqu’à la fin 2023, les États membres du bloc peuvent décider de suspendre certaines de ces règles, notamment concernant la mise en jachère d’une certaine quantité de terres ou encore la rotation des cultures.

Des choix difficiles laissés aux États membres

La suspension de ces obligations environnementales pourrait permettre aux agriculteurs d’augmenter leur production à court terme, mais cela aurait probablement des effets néfastes sur la protection de la biodiversité et le climat.

Selon le ministre allemand, l’exécutif européen laisse intentionnellement aux gouvernements nationaux le soin de trouver un compromis entre les avantages et les inconvénients de la suspension des règles environnementales, alors qu’il est conscient que la protection du climat et de la biodiversité est « la condition préalable de notre agriculture ».

Si le ministre allemand s’est déjà prononcé en faveur d’une plus grande flexibilité au niveau de la rotation des cultures, ce qu’il a qualifié de mesure raisonnable, il s’est à plusieurs reprises fermement opposé à l’autorisation de la production agricole sur les terres en jachère, invoquant les « conséquences considérables pour la biodiversité ».

Dans le même temps, M. Özdemir a également critiqué le fait que la Commission a négligé ce qui est, selon lui, « le plus grand levier pour garantir l’approvisionnement alimentaire mondial » : produire moins d’aliments pour animaux et de biocarburants afin de consacrer davantage de terres agricoles à la production de nourriture pour la population.

« C’est là que se trouve le potentiel vraiment important que nous devons utiliser pour vaincre la faim », a-t-il déclaré. « Sur ce point, j’attends des propositions de Bruxelles. »

Toutefois, la proposition de la Commission exclut les cultures généralement destinées à l’alimentation animale, telles que le maïs et le soja, se concentrant sur « ce qui est strictement nécessaire pour répondre aux préoccupations en matière de sécurité alimentaire mondiale nées de l’agression militaire russe contre l’Ukraine», peut-on lire dans un communiqué de presse vendredi dernier (22 juillet).

La réponse de l’Allemagne doit être « soigneusement évaluée »

Malgré les paroles fortes de M. Özdemir, il est peu probable que la réaction de Berlin vis-à-vis des recommandations de la Commission ait un impact significatif au niveau de l’UE, d’autant plus que la majorité des États membres se range du côté de Bruxelles.

Lors de leur dernière réunion en début de semaine dernière, une majorité de ministres nationaux de l’Agriculture ont convenu que l’exécutif européen devrait permettre une plus grande flexibilité au niveau des règles environnementales de la PAC en réponse à la guerre en Ukraine, à l’instar de ce qui a été fait avec les dérogations récemment présentées.

Au niveau national, cependant, l’appréhension de M. Özdemir pourrait bien impliquer que l’Allemagne n’exploite pas pleinement les nouvelles possibilités de flexibilité offertes par la Commission.

À cet égard, la ministre écologiste a promis d’« examiner attentivement les conditions -cadres » de la mise en œuvre des décisions de la Commission en Allemagne, en coopération avec le cabinet gouvernemental, les régions et les parties prenantes, tout en veillant à ne pas opposer durabilité et sécurité alimentaire.

« Nous prendrons des décisions pragmatiques après avoir étudié en détail leurs avantages et leurs inconvénients », a-t-il déclaré.

Il est probable qu’une étape essentielle de ce processus décisionnel soit franchie ce jeudi (28 juillet), date à laquelle M. Özdemir et ses homologues régionaux se réuniront pour discuter de la mise en œuvre de la réforme de la PAC de l’UE au niveau national, et notamment de la manière de l’adapter aux conséquences de la guerre en Ukraine.

Source: euractiv.fr

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