Ségolène Royal met en consultation la liste des néonicotinoïdes qui seront interdits en 2018
La ministre de l'Environnement met en consultation la liste des substances qui seront visées par l'interdiction des néonicotinoïdes à compter de 2018. Elle souhaiterait étendre cette interdiction à l'ensemble de l'Union européenne.
Ségolène Royal met en consultation ce mardi 14 février le projet de décret qui fixe la liste des néonicotinoïdes concernés par l'interdiction votée dans le cadre de la loi sur la biodiversité promulguée l'été dernier. Avec ce texte, notifié à la Commission européenne le 2 février dernier, elle entend « envoyer un signal fort » aux autres États membres.
Puissants insecticides systémiques
Les sept substances actives concernées sont les suivantes : acétamipride, clothianidine, dinotéfurane, imidaclopride, nitenpyrame, thiaclopride, thiamétoxame. « Cinq de ces substances sont autorisées dans l'Union européenne en tant que produits phytosanitaires », précise Ségolène Royal. Certaines d'entre elles sont utilisées dans des insecticides emblématiques comme le Gaucho commercialisé par Bayer ou le Cruiser par Syngenta.
« Ces sept substances font partie d'une famille homogène de substances qui présentent les mêmes caractéristiques : ce sont de puissants insecticides agissants sur le système nerveux des insectes et qui sont systémiques. Il en résulte que l'on retrouve ces substances dans tous les organes de la plante une fois celle-ci traitée » précise le bureau des produits chimiques du ministère de l'Environnement.
De nombreuses publications scientifiques et des organismes reconnus, comme l'Efsa, l'Inra, le CNRS ou l'ANSES, « vont dans le sens d'un impact majeur des néonicotinoïdes » sur des organismes non cibles telles que les abeilles, les macro-invertébrés ou les oiseaux, ajoutent les représentants du ministère. L'Efsa a en outre confirmé que « deux insecticides néonicotinoïdes – l'acétamipride et l'imidaclopride – peuvent avoir une incidence sur le développement du système nerveux humain », rappelle Ségolène Royal.
Comparaison de chacune des alternatives
La loi pour la reconquête de la biodiversité interdit l'utilisation des produits phytopharmaceutiques contenant des néonicotinoïdes et des semences traitées avec ces produits à compter du 1er septembre 2018. Elle prévoit toutefois que des dérogations à cette interdiction pourront être accordées jusqu'au 1er juillet 2020 par arrêté interministériel pris sur la base d'un bilan établi par l'ANSES. Ce bilan, qui devra être rendu public, portera sur les impacts sur l'environnement, en particulier sur les pollinisateurs, sur la santé publique et sur l'activité agricole.
Les dirigeants de l'agence sanitaire ont précisé, lors de la présentation de leur programme de travail pour 2017, qu'ils travaillaient d'ores et déjà sur la comparaison des néonicotinoïdes et de chacune de leurs alternatives, qu'elles soient biologiques, chimiques ou agroécologiques. « Ces travaux amèneront à comparer plus de 3.500 usages de préparations phytopharmaceutiques, ainsi que des alternatives non chimiques », a précisé Roger Genet, le directeur général. L'ANSES mène en même temps une expertise sur les effets sur la santé humaine de l'ensemble des néonicotinoïdes autorisés au niveau national en tant que produits phytopharmaceutiques, biocides ou médicaments vétérinaires.
« Mettre un terme à l'usage des néonicotinoïdes en Europe »
Ségolène Royal se veut aussi le fer de lance du combat contre les néonicotïnoides en Europe. Il faut que la Commission « ait le courage de mettre un terme à l'usage des néonicotinoïdes au niveau européen », déclare la ministre qui demande une accélération du calendrier de réévaluation des substances encore présentes sur le marché européen.
En 2013, la Commission européenne a mis en place un moratoire partiel sur trois de ces substances : l'imidaclopride, la clothianidine et le thiaméthoxame. Un moratoire contesté devant les tribunaux par les groupes Syngenta et Bayer. Mais cela n'a pas empêché une utilisation accrue des néonicotinoïdes : + 24 % en France entre 2013 et 2015 (de 380 à 470 tonnes).
Pour la ministre française, deux éléments renforcent la nécessité d'une action rapide : les premières conclusions de l'Efsa qui confirment les risques pour les pollinisateurs, de même que la proposition de classement auprès de l'Echa du thiaclopride comme substance reprotoxique présumée et cancérogène suspectée.
Mme Royal déplore d'autant plus le délai de trois années supplémentaires que l'exécutif européen a annoncé le 10 février en vue de réexaminer les risques de l'imidaclopride, substance active utilisée dans le Gaucho.
Source : actu-environnement.com