La transition énergétique mondiale place l’Afrique subsaharienne en position de force pour accélérer son développement, selon un rapport
La Banque mondiale souligne qu’en Afrique subsaharienne, l’extrême pauvreté se concentre essentiellement dans des pays riches en ressources naturelles. Mais grâce à la demande mondiale en minerais stratégiques nécessaires aux technologies propres, le continent africain se trouve en position suffisamment forte pour inverser la situation et se placer sur les rails de l’émergence.
Les pays d’Afrique subsaharienne n’engrangent en moyenne que 40 % des recettes qu’ils pourraient potentiellement tirer de leurs ressources naturelles, mais la transition énergétique et l’explosion de la demande de minerais stratégiques qui s’en suivra, leur offrent une occasion inespérée d’inverser cette situation, a estimé la Banque mondiale dans un rapport publié en avril 2023 et repris par l’Agence Ecofin.
Intitulé « Africa’s Resource Future : harnessing natural resources for economic transformation during the low-carbon transition », le rapport précise que les minerais, le pétrole et le gaz représentent au moins un tiers des richesses totales de la région. La conversion des richesses du sous-sol en une prospérité durable et équitable a été cependant très limitée.
Durant la période qui a suivi le super-cycle des matières premières de 2004 à 2014, la croissance annuelle du PIB par habitant dans les pays riches en ressources naturelles était en moyenne inférieure de 1,5 point de pourcentage aux niveaux moyens enregistrés dans les pays peu nantis en ressources naturelles de la région, a noté Ecofin dans ses colonnes.
L’augmentation des recettes des Etats consécutive au boom des matières premières, ne s’est pas non plus traduite par des niveaux correspondants de réduction de la pauvreté.
Une transition énergétique riche en opportunités
L’extrême pauvreté est de plus en plus concentrée dans les pays d’Afrique subsaharienne riches en ressources naturelles. D’ici 2030, l’Afrique subsaharienne devrait abriter plus de 80 % des pauvres de la planète, et près de 75 % des pauvres de l’Afrique subsaharienne vivront dans des pays dont les sous-sols regorgent d’hydrocarbures et de minerais, a encore renchéri l’Agence Ecofin.
Le rapport souligne cependant que la transition énergétique mondiale et l’abandon progressif des combustibles fossiles offrent à l’Afrique subsaharienne une opportunité inégalée pour conjurer la corrélation négative entre la disponibilité de ressources naturelles abondantes et le développement économique et social, plus connue sous l’appellation de la malédiction des ressources naturelles.
Selon le rapport cité par Ecofin, s’il est vrai que la transition énergétique risque de transformer d’importants gisements de pétrole, de gaz et charbon en « actifs échoués », il n’en demeure pas moins qu’elle augmentera fortement la demande de matières premières nécessaires aux technologies énergétiques propres. D’ici 2050, le passage des combustibles fossiles aux énergies propres pourrait en effet engendrer une demande de 3 milliards de tonnes de minéraux et de métaux stratégiques nécessaires au déploiement de l’énergie solaire, éolienne et géothermique. Des minerais comme le lithium, le cobalt et le vanadium sont en effet essentiels pour le stockage de l’énergie tandis que le cuivre, l’indium, le sélénium et le néodyme sont indispensables pour le fonctionnement des centrales solaires et des parcs éoliens. Cela place évidemment l’Afrique subsaharienne dans une excellente position pour bénéficier de la transition vers l’énergie propre. Des pays tels que la République démocratique du Congo, l’Afrique du Sud et la Zambie sont d’ores et déjà des acteurs clés dans ce domaine, puisqu’ils sont respectivement les principaux producteurs mondiaux de cobalt, de platine et de cuivre.
Améliorer la taxation des industries extractives
Dans ce cadre, les pays riches en ressources naturelles situés au Sud du Sahara gagneraient à mieux taxer les industries extractives, à la fois pour capter une plus grande part des recettes et pour faire supporter aux producteurs le coût total de leur impact environnemental et social. L’absence d’une telle taxation peut constituer une subvention implicite à la production et accroître les émissions de carbone. Maximiser les recettes publiques sous forme de redevances et d’impôts payés par les entreprises exploitant les ressources naturelles, tout en attirant de nouveaux investissements, pourrait augmenter la marge de manœuvre budgétaire et supprimer les subventions implicites à la production, avec à la clé un double dividende pour les populations et l’environnement.
Outre la nécessité de capter une importante part des rentes tirées des ressources naturelles, les gouvernements devraient se préparer à la prochaine chute des prix des matières premières en investissant ces recettes dans le capital productif, c’est-à-dire dans la santé, l’éducation, les infrastructures, les forêts, l’agriculture et le tourisme axé sur la nature, afin de diversifier les économies de la région et d’augmenter leur résilience.
La Banque mondiale recommande par ailleurs aux pays d’Afrique subsaharienne de renforcer la gouvernance du secteur extractif et d’exploiter les opportunités liées à la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), qui prévoit l’élimination progressive de 90 % des droits de douane entre pays africains au cours des cinq à dix prochaines années. Une plus grande intégration commerciale et économique régionale offre une occasion sans précédent de développer la chaîne de valeur, de la mine au marché, sur le continent. En effet, le développement axé sur les ressources naturelles sera facilité par un meilleur accès à des marchés plus importants et par la capacité de mettre en commun les ressources, les compétences et les avantages compétitifs, a conclu l’Agence Ecofin dans ses colonnes.