1 vol sur 10 au départ de la France en 2019 était effectué en jet privé, un mode de transport qui émet 10 fois plus de carbone que les liaisons aériennes commerciales.
1 vol sur 10 au départ de la France est un jet privé

1 vol sur 10 au départ de la France en 2019 était effectué en jet privé, un mode de transport qui émet 10 fois plus de carbone que les liaisons aériennes commerciales, montre un nouveau rapport de l’ONG Transport & Environment (T&E).[1]

Le rapport en question, intitulé Private jets: can the super-rich supercharge zero emission aviation? [Jets privés : les super-riches peuvent-ils booster l’aviation zéro émission ?], révèle que les émissions de CO2 des jets privés en Europe ont augmenté de près d’un tiers (31 %) entre 2005 et 2019, soit plus rapidement que les émissions de l’aviation commerciale.

Selon les conclusions du rapport, un vol privé de quatre heures génère autant d’émissions qu’un individu moyen en un an. T&E souligne toutefois que les propriétaires de jets privés, qui disposent d’une fortune moyenne de 1,3 milliard d’euros, pourraient faire partie de la solution en finançant le développement de technologies plus vertes, à même d’accélérer l’innovation et la décarbonisation dans l’ensemble du secteur aérien.[2]

Le rapport met en évidence le recours aux jets privés l’année dernière malgré la pandémie. En août 2020, alors que la plupart des Européens étaient toujours cloués au sol et que les vols commerciaux étaient en baisse de 60 % par rapport à l’année précédente, le trafic des jets privés avait retrouvé son niveau d’avant la crise de la Covid-19. Un opérateur a même signalé une augmentation de 11,3 % des ventes de vols privés pour le seul mois de juillet 2020.[3]

« Voyager en jet privé est probablement la pire chose que l’on puisse faire pour l’environnement. Et pourtant, les super-pollueurs super-riches le font comme s’il n’y avait pas de crise climatique. Le côté positif, c’est que le marché des jets privés se prête tout à fait à l’émergence d’un Tesla de l’aérien, en faisant des avions à hydrogène et électriques une réalité », a déclaré Jo Dardenne, responsable aviation chez T&E.

Le rapport constate que la moitié des vols en jet privé en France parcourent moins de 500 km, soit la distance opérationnelle où les avions sont les moins performants et donc les plus polluants. Il montre également que :

  • Les jets privés au départ de la France et du Royaume-Uni constituent la principale source de pollution, représentant à eux seuls plus d’un tiers (36 %) des émissions des vols privés en Europe.
  • Près de 60 % des émissions générées par les jets privés en France sont liées à deux aéroports, Paris-Le Bourget et Nice-Côte d’Azur. 
  • Les vols en jet privé au départ de Nice triplent pendant les mois d’été. 
  • Les 1 000 vols entre Paris et Nice polluent à eux seuls autant que 40 000 familles se rendant sur le même lieu de vacances en voiture. 
  • Sept des dix itinéraires les plus polluants empruntés par les avions privés en Europe se situent sur l’axe Royaume-Uni-France-Suisse-Italie.

Malgré leur impact démesuré sur le climat, les jets privés ne sont pas taxés dans la plupart des pays européens en raison des exemptions prévues par le système européen d’échange de quotas de CO2 (EU ETS) et de la non-taxation du kérosène. 

En France, le taux d’imposition du carburant des jets privés est 35 à 40 % inférieur à celui de l’essence, ce qui procure un avantage fiscal aux personnes aisées par rapport à celles voyageant en voiture ou en train. L’année dernière, la Convention citoyenne pour le climat a recommandé des taux d’imposition beaucoup plus élevés sur les vols afin de générer des recettes qui pourraient être utilisées pour subventionner les carburants et les technologies à faible teneur en carbone .

Alors que le secteur aérien se prépare à la reprise après les confinements en Europe, son impact environnemental fait l’objet d’une attention croissante. La France a récemment interdit certains vols intérieurs courts. T&E demande à ce que cette interdiction soit également étendue à tous les vols courts en jet privé.

Selon les calculs de T&E, une taxe sur le kérosène proportionnelle aux distances parcourues rapporterait 325 millions d’euros si elle était appliquée à tous les vols au départ de l’UE et du Royaume-Uni. Le rapport suggère que les recettes ainsi engrangées pourraient être utilisées pour accélérer la décarbonisation du secteur aérien. 

« Si la France interdit les vols court courriers inutiles, alors les trajets en jet privés devraient aussi être interdits. La bonne nouvelle, c’est que ces courts trajets constituent une cible de choix pour être remplacés par des technologies propres, comme les avions électriques ou à hydrogène. Les responsables politiques européens doivent de toute urgence commencer à taxer les jets privés fonctionnant aux carburants fossiles et interdire leur utilisation d’ici à 2030. Les recettes perçues auprès des super-riches pourraient être investies dans des technologies plus vertes qui permettraient de rendre les vols plus propres pour tout le monde », a expliqué Jo Dardenne.

Le rapport propose trois recommandations pour contribuer à la décarbonisation du secteur et atténuer l’impact démesuré des jets privés sur le climat : 

  1. L’hydrogène et l’électrique : d’ici à 2030, les législateurs ne devraient autoriser que l’utilisation d’avions à hydrogène vert ou électriques pour les vols en jet privé de moins de 1 000 km en Europe.[4]
  2. Le pollueur-payeur : avant l’entrée en vigueur de cette interdiction en 2030, un prix effectif doit être fixé sur les émissions de carbone, des taxes sur le kérosène et les vols devraient être imposés aux jets privés fonctionnant à l’énergie fossile, en fonction de la distance parcourue et du poids de l’appareil, afin de tenir compte de leur impact démesuré sur le climat. 
  3. Le transport alternatif : les entreprises et les particuliers doivent s’engager à réduire considérablement l’utilisation de jets privés. Au fur et à mesure de l’émergence de nouvelles technologies, ces vols devraient être interdits lorsqu’il existe des alternatives qui n’allongent pas le temps de trajet de plus de 2 heures 30. 

Notes aux rédacteurs :

[1] Sur la base des données de la plateforme STATFOR d’EUROCONTROL : https://www.eurocontrol.int/dashboard/statfor-interactive-dashboard 

[2] Page 5 – https://www.vistajet.com/globalassets/documents/jettravelerreport.pdf

[3] https://privatejetcardcomparisons.com/2020/08/03/globeair-reports-a-record-busting-july-for-private-jet-flights-in-europe/

[4] T&E demande aux législateurs de n’autoriser que l’utilisation d’avions à hydrogène ou électriques fonctionnant à l’hydrogène vert ou à l’électricité pour les vols en jet privé de moins de 1 000 km en Europe d’ici à 2030. Les grandes compagnies de jets privés devraient être obligées de conclure des accords d’achat d’électricité (AAE) avec des fournisseurs d’e-kérosène pour l’ensemble des vols.

Source: transportenvironment.org

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