Pourtant, il n'existe toujours pas de normes pour ces minuscules toxiques, donc pas de seuils d'alerte et personne pour les mesurer en continu dans les grandes agglomérations. « Nous réclamons une surveillance réglementaire depuis bien longtemps ! s'exclame Franck Olivier Torro, de l'association Respire. Sinon constructeurs et pouvoirs publics se targuent tranquillement de la diminution apparente de la pollution. Or c'est faux ! Les voitures émettent simplement des polluants plus petits qui passent sous les radars. »
L'Anses plaide dans le même sens. « Il faut que les directives européennes réglementent ces particules ultrafines », insiste Valérie Pernelet-Joly. Pour l'heure, les associations de surveillance de qualité de l'air comme Airparif pour l'Ile de France ou Atmo-Sud pour la région PACA ont bien développé des outils pour les comptabiliser, mais à toute petite échelle, à titre expérimental.
Freinage et pneus pèsent lourd
C'est nouveau, l'étude de l'Anses montre que la pollution routière ne sort pas uniquement des pots d'échappement, loin de là ! Il faut aussi compter avec les particules émises par le frottement des pneus contre la chaussée, ou lorsque les plaquettes de frein se pressent l'une contre l'autre… sans oublier toutes les minuscules poussières au sol redispersées dans l'air au passage des véhicules.
« On parle de substances baptisées aérosols inorganiques secondaires, d'ammonium, de sulfate, nitrate et même des métaux type fer ou zinc. C'est un enjeu important, pas encore assez pris en compte », pointe la pro des risques à l'Anses. « Les voitures électriques ne brûlent pas de carburant certes mais par ces moyens elles polluent autant si ce n'est plus, si elles sont plus lourdes à cause de leur batterie », fait-elle remarquer. Et si l'on lessivait la voirie à l'eau pour éviter qu'elles ne flottent dans l'air, ce serait efficace ? « Non, la seule façon de ne pas les rediffuser est de ne pas rouler », répond Valérie Pernelet-Joly. Selon elle, il faut impérativement que l'on tienne compte de ces critères. Notamment pour décider des restrictions de circulation qui excluent les voitures électriques.
Une seule solution, réduire le trafic !
Dans son étude, l'Anses a modélisé plusieurs scénarios du futur en utilisant l'Ile-de-France comme laboratoire. « Pas par parisianisme mais parce que c'est la région la plus peuplée », précise Valérie Pernelet-Joly. Par exemple, dans un premier scénario, tous les diesels sont équipés de filtres à particules. Dans un autre, les véhicules électriques se développent à vitesse grand V. A trafic constant, dans toutes ces projections, même les plus optimistes, la pollution baisse certes. Mais la concentration de toxique de l'air ambiant reste supérieure aux seuils fixés par l'OMS. C'est-à-dire que la teneur en gaz et les particules en suspension restent quoi qu'il en soit dangereuses pour la santé.
« Le levier principal est de réduire le trafic », martèle Valérie Pernelet-Joly. L'Anses préconise donc plus de transports en commun et quand c'est possible de remplacer le petit tour en voiture par une bonne marche ou quelques minutes à vélo.
* «Particules de l'air ambiant extérieur» avis de l'Anses, rapport de synthèse et de recommandation de l'expertise collective, juillet 2019.