"Nous devons nous engager avec les peuples autochtones d’Amazonie car leur combat est aussi le nôtre, c’est celui de notre avenir à tous et toutes." Avec ces mots, la princesse Esmeralda de Belgique plante le décor le 7 juin dernier lors de la projection de son film Amazonie, cœur de la Terre Mère qui documente les liens indissociables entre la lutte pour l’environnement et la lutte pour les droits humains
Les femmes, premières victimes de la déforestation

Il retrace plus de 60 ans de combat des peuples indigènes brésiliens pour délimiter et protéger leurs terres. "On parle toujours de la forêt, de sauver l’Amazonie mais on oublie qu’il y a des habitants sur ces terres et que ce sont eux les plus touchés", précise la princesse, journaliste et présidente du Fonds Léopold III pour l’exploration et la conservation de la nature. Elle y donne notamment la parole à l’incontournable chef Raoni Metuktire du peuple Kayapo et à la jeune militante Val Munduruku du peuple Munduruku.

"Cela touche les êtres humains de façon inégale"

Également interrogée dans le documentaire, la cofondatrice du mouvement Youth for Climate Adélaïde Charlier confie ne pas avoir saisi tout de suite l’importance du combat contre la déforestation. "J’ai commencé mon activisme avec une vision très restreinte de la lutte. En rencontrant le chef Raoni, j’ai compris que l’une des meilleures solutions face à l’urgence climatique est la préservation des forêts car elles absorbent le plus de gaz à effet de serre."

Son voyage en Amazonie pour la COP 25 lui permet de rencontrer les peuples indigènes qui vivent sur ces terres. "J’ai compris que le climat, ça concerne aussi les êtres humains dans leur chair, et en plus de manière inégale. Je me suis rendu compte que je devais m’éduquer sur les enjeux liés au colonialisme car ils impactent encore aujourd’hui les peuples autochtones et la prise en compte des droits de ces peuples pour protéger les forêts."

"Les femmes sont affectées de manière disproportionnée par le changement climatique"

La déforestation appauvrit en effet les peuples indigènes qui se nourrissent et travaillent grâce aux produits de la forêt. Or cet appauvrissement touche plus durement les femmes que les hommes. Un rapport de l’OCDE démontre ainsi que "les femmes partout dans le monde sont affectées de manière disproportionnée par le changement climatique, la déforestation, la désertification, la raréfaction de l’eau et l’insuffisance de l’assainissement".

Dans de nombreux pays concernés, les femmes sont chargées de l’approvisionnement en eau, de la cueillette des plantes et des provisions alimentaires de leur foyer. La dégradation des terres les rend d’autant plus vulnérables que, dans les sociétés traditionnelles, leur accès aux ressources et à la propriété passe après celui des hommes.

"Quand on n’a pas le minimum pour vivre, on ne peut pas s’adapter face à une crise. Généralement, les femmes sont donc les premières touchées par la destruction de la terre", constate Adélaïde Charlier.

A cette précarisation s’ajoutent des violences sexistes."Elles ont beaucoup de courage car quand des multinationales, des orpailleurs ou des bûcherons font des incursions sur leur territoire, elles sont très souvent agressées et violées, précise la princesse Esmeralda de Belgique. Pourtant, malgré cela, elles continuent le combat pour leurs enfants et leur communauté."

"La place des femmes dans la lutte est essentielle"

C’est aussi cet engagement que le documentaire Amazonie, cœur de la Terre Mère met en lumière. "Je voudrais rendre hommage aux femmes indigènes, qui sont vraiment à la pointe du combat contre la déforestation." En tant que cheffes de tribu ou militantes, elles s’imposent face au machisme. "Dans ces tribus, c’étaient les hommes qui devaient parler et non les femmes. Mais elles ont pris leur place en disant que c’était aussi leur combat."

Un combat parfois risqué. "Dans le film, on suit une cheffe de tribu qui rappelle que son père et son grand-père ont été assassinés et qui continue néanmoins à s’engager d’une manière extraordinaire", souligne Esmeralda de Belgique.

De nombreuses associations de femmes se développent ainsi à travers le monde. Dans la forêt amazonienne comme dans la province du Bas Congo et dans la région de Kaffrine au Sénégal par exemple, les femmes s’organisent pour protéger leurs terres et assurer à leur communauté des conditions de vie dignes.

"Elles sont rejetées des institutions et des postes à responsabilités dans lesquels elles pourraient prendre des décisions nécessaires. Par conséquent, elles s’engagent activement dans les combats sociaux et environnementaux et prennent ainsi une place essentielle dans la lutte", conclut Adélaïde Charlier.

Co-réalisé avec Gert-Peter Bruch, engagé depuis plus de 30 ans pour la protection de la forêt amazonienne, le documentaire Amazonie, cœur de la Terre Mère sera disponible dès l’année prochaine.

Source: RTBF

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