Hausse de la rémunération, simplification des normes, arrêt des contrôles intempestifs… Voici une liste non exhaustive des revendications des paysans, à l’origine de leur mouvement de contestation.
Les 10 raisons de la colère des agriculteurs en France
Générée par l'IA

La colère des agriculteurs ne faiblit pas, et ce malgré la rencontre, lundi soir, entre la FNSEA, les Jeunes agriculteurs, le premier ministre Gabriel Attal et le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau. À l'issue de cette réunion, la FNSEA avait prévenu : il n'y aura «pas de levée des actions menées sur le terrain» sans «décisions concrètes». Et la mort brutale d'une agricultrice sur un point de blocage, tuée par une voiture bélier tentant de forcer un blocage à Pamiers (Ariège) ce mardi matin, ne risque pas d'atténuer l'embrasement.
À l'origine du mouvement, des revendications multiples. Le Figaro fait le point sur les 10 principales raisons de la colère des agriculteurs français, dont certaines diffèrent d'une région à l'autre.

Sept revendications d'ampleur nationale :

1. Une meilleure rémunération

Malgré la mise en place des États généraux de l'alimentation visant à protéger la rémunération des agriculteurs et des lois qui ont suivi (Egalim 1,2,3), l'embellie n'a été que de courte durée. En 2021 et 2022, les prix des denrées agricoles ont certes augmenté, mais ils sont repartis à la baisse en 2023. Selon l'Insee, les revenus ont baissé de 40% en 30 ans. Et un agriculteur sur cinq vit sous le seuil de pauvreté.
Les paysans ont le sentiment de servir de variable d'ajustement dans les négociations annuelles commerciales entre la grande distribution et les industriels de l'agro-alimentaire -qui s'achèvent fin janvier. Les agriculteurs reprochent aux transformateurs de ne pas leur répercuter les hausses de prix qu'ils ont obtenues sur leurs produits auprès des centrales d'achat des grandes et moyennes surfaces (GMS).
Le lait, par exemple, est payé par les laiteries aux éleveurs environ 0,40 € le litre ; en baisse de 6 centimes par rapport à l'an dernier. En rayon, la brique UHT vaut en moyenne 1,07 €, soit plus de 2,6 fois plus chère qu'au départ de la ferme. À ce niveau de prix, beaucoup d'éleveurs couvrent leurs charges de structure, mais pas leur main-d'œuvre. Selon eux, le rapport de force est déséquilibré : on ne compte que cinq centrales d'achat dans le pays, pour 50.000 éleveurs et 762 laiteries.

2. Maintien de la détaxation du gasoil non routier

Face à l'explosion des charges, notamment de l'énergie, les agriculteurs demandent que le gouvernement revienne sur son projet de suppression de détaxation du gasoil non routier.

3. Simplification des normes environnementales

Pour pouvoir bénéficier des aides européennes de la Politique agricole commune (PAC) - une enveloppe de 9 milliards par an, les agriculteurs doivent respecter un certain nombre de règles communautaires. Au nom de la transition écologique et du «green deal», qui appelle à la décroissance de la production agricole, les paysans doivent augmenter cette année à 4% la surface des jachères. Ceux qui ont quitté l'élevage laitier, souvent pour des raisons économiques, doivent réimplanter des prairies même s'ils n'en ont plus l'usage, au nom de la biodiversité.

4. Meilleure considération par la société

Beaucoup d'agriculteurs se disent lassés de la stigmatisation dont ils s'estiment victimes comme «pollueurs», car ils utilisent des produits phytopharmaceutiques pour soigner leurs plantes ou épandent des engrais dans leurs champs. Ils regrettent également être régulièrement accusés de maltraiter leurs animaux et répètent qu'ils ont tout intérêt à les élever du mieux possible. Autant de stigmatisations perçues comme injustes par les paysans, qui rappellent à l'envi que leur mission est de nourrir la population et qu'ils ne comptent pas leurs heures. Souvent bien intégrés à la vie locale, ils rendent par ailleurs de nombreux services aux habitants avec leurs tracteurs, notamment pour déneiger les routes, transporter des personnes en cas d'inondations ou aider les pompiers à arrêter les incendies de champs ou de forêt avec leur tonne à lisier.

5. Fin des contrôles intempestifs

Pour s'assurer que les normes en vigueur et les réglementations liées à la biodiversité -comme l'interdiction de déboucher en fossé sans autorisation- sont bien respectées, l'administration envoie des contrôleurs sur le terrain. La police environnementale de l'OFB, armée, peut débarquer sur les parcelles de l'exploitant sans autorisation préalable.
Dans les Vosges, un agriculteur qui avait enlevé des branchages près d'une rivière a par exemple été condamné pour destruction d'habitation d'une espèce protégée - en l'occurrence le castor. Dans l'Oise, un agriculteur accusé d'avoir mis du glyphosate sur un chemin, a mis fin à ses jours en octobre 2022 car il ne supportait plus d'être considéré comme un délinquant par l'administration. Il fait partie de ces deux paysans qui se suicident par jour.

6. Meilleur accès à l'eau

Le sujet de l'accès à l'eau fait également partie des revendications clés pour les agriculteurs. Partout en France, les paysans aimeraient pouvoir constituer des réserves de stockage d'eau plus facilement, sans avoir à remplir des conditions de plus en plus restrictives. Leur but est de garder une partie de l'eau quand elle tombe en abondance pour la réutiliser quand elle se fait rare et que la nature en a le plus besoin, au printemps et l'été.
En Occitanie, épicentre de la protestation actuelle, la région a souffert de deux étés secs consécutifs et les nappes phréatiques sont toujours dans un état critique. L'abandon du projet de barrage à Sivens, dans le Tarn il y a dix ans, sous la pression de militants écologistes, reste dans toutes les mémoires. Dans le Lot et Garonne, les agriculteurs ont créé une réserve collinaire pour permettre aux arboriculteurs et aux éleveurs riverains de pouvoir continuer à exercer leur métier, au risque d'être condamné à une amende ou même une peine de prison. Dans les Deux-Sèvres, la question des bassines a fait l'objet de violents combats entre les paysans et les écologistes.

7. Pas d'interdictions de produits phytopharmaceutiques sans solutions alternatives

L'an dernier, la première ministre Elisabeth Borne avait dressé la liste de 75 molécules qui devaient disparaître du marché dans les prochaines années, mais sans donner de produits de substitution. Déjà en 2016, l'ancien ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll avait interdit le recours au diméthoate, utilisé pour lutter contre une mouche, la drosophile suzukii, qui pond ses larves dans les cerises. Mais sans produit alternatif, la filière est en train de s'effondrer. Dans les betteraves à sucre, l'arrêt des néonicotinoïdes, un insecticide contre les pucerons, laisse dans le désarroi de nombreux paysans. Ils assurent ne pas avoir de produits alternatifs pour soigner la jaunisse de leurs plantes.
Trois revendications plus locales :

8. La maladie hémorragique épizootique (MHE)

Transmise par une mouche qui affecte les bovins dans le Sud-Ouest, cette maladie met à mal les éleveurs locaux. Ils demandent que les aides promises par le ministre de l'Agriculture en novembre dernier leur soient immédiatement versées.

9. Tirs de prédation sur le loup

Dans un grand quart Sud-Est, les éleveurs de brebis exigent la simplification des tirs de régulation afin de diminuer la pression de prédation du loup. Plus de 1000 ovins environ meurent chaque année après des attaques du canidé sur des troupeaux.

10. Tirs d'effarouchement contre l'ours

Dans les Pyrénées, et plus particulièrement en Ariège, les bergers demandent la possibilité de tirs d'effarouchement contre les ours, qui tuent près d'un millier de brebis annuellement.
 

Source : lefigaro.fr

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