Parmi les nombreux efforts menés pour que la Russie rende des comptes pour son invasion de l’Ukraine, des militants demandent à la plus haute cour européenne des droits de l’homme de condamner Moscou pour « catastrophe climatique ».
La Russie « tue » le climat, selon des militants

L’organisation russe pour l’environnement Ecodefense et 18 individus ont saisi l’an dernier la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), affirmant que Moscou aggrave la crise climatique mondiale.

« La Russie tue le climat », a affirmé dans un récent entretien à l’AFP le co-président d’Ecodefense, Vladimir Slivyak, qui a reçu en 2021 le prix Right Livelihood, un « Nobel alternatif ».

Il a souligné que le président russe Vladimir Poutine avait signé l’accord de Paris de 2015 sur le climat visant à maintenir le réchauffement de la planète sous 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle.

M. Slivyak accuse Moscou de ne faire aucun effort pour limiter les émissions de gaz à effet de serre ou réduire l’extraction de combustibles fossiles.  

Selon lui, des documents politiques internes montrent que la Russie prévoit, au moins pour la prochaine décennie, de faire « une extraction croissante de charbon, de pétrole et de gaz », pouvant aller jusqu’à une croissance de 50 %.

 

La guerre alimente les émissions

Selon M. Slivyak, qui a quitté la Russie en 2021 sur fond de répression de la société civile à l’approche des élections législatives, l’augmentation des émissions russes de gaz à effet de serre est liée à la guerre en Ukraine.  

Bien que les statistiques officielles ne soient pas disponibles, il affirme qu’« il doit y avoir une forte augmentation des émissions de gaz à effet de serre avec la guerre » en raison de la production supplémentaire de chars et d’armes.  

Par ailleurs, « la Russie ne peut poursuivre la guerre que si elle vend suffisamment de combustibles fossiles », souligne-t-il, réclamant davantage de sanctions : « Si le monde cessait maintenant d’acheter des combustibles fossiles à la Russie, cela conduirait probablement à la fin de cette guerre dès cette année ».  

Les plaignants ont déposé leur plainte devant la CEDH en août dernier, après avoir d’abord tenté de porter l’affaire devant la Cour suprême de Russie, qui a refusé de les entendre. « Nous voulons que la cour décide que la politique russe est dangereuse pour le climat et le monde », a soutenu M. Slivyak.

 

Bien pire

Pas une première.

Dans un arrêt historique rendu en avril, la CEDH a condamné la Suisse pour son manque d’action climatique. Or la situation de la Russie est bien pire, selon M. Slivyak.  

« La Russie sape les efforts internationaux » pour lutter contre le réchauffement climatique, estime-t-il.  

Ecodefense a demandé à la CEDH d’accélérer le traitement du dossier russe, comme la cour l’a fait pour d’autres questions liées au climat. Mais la CEDH a rejeté leur demande la semaine dernière, selon Ecodefense.

La dernière fois qu’Ecodefense a contribué à porter une affaire devant la CEDH remonte à 2013. Elle faisait alors partie des organisations demandant une décision contre la loi russe qui exige que toute personne recevant un soutien de l’étranger soit répertoriée en tant qu’agent étranger.

Le tribunal a mis près de dix ans à rendre sa décision, et bien que la décision de 2022 ait été en faveur des organisations, « il était trop tard », déplore M. Slivyak, soulignant que les groupes avaient déjà tous fui le pays. Une décision plus rapide aurait peut-être changé le cours de l’histoire, selon lui.

 

« Précédent »

À la suite de l’invasion en Ukraine en 2022, la Russie a été exclue du Conseil de l’Europe. Mais les plaintes concernant des violations qui auraient été commises par la Russie avant son exclusion le 16 septembre 2022 restent recevables devant la CEDH.  

Même s’il est peu probable que la Russie se soucie de la CEDH, M. Slivyak a insisté sur le fait qu’obtenir une décision dans cette affaire pourrait être utile pour façonner la politique lorsque la « dictature fasciste » russe tombera un jour.

Au niveau international également, a-t-il ajouté, cela pourrait créer un « précédent », poussant les gouvernements à adopter des politiques climatiques plus ambitieuses. « Cela pourrait tout changer ».

Source: La Presse

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