La position du conseil de l’UE sur le règlement « emballage » de l’UE (PPWR), adoptée le 18 décembre, prévoit toujours la consigne des bouteilles en plastique. Les États membres ont tout de même assoupli la dérogation, mais les élus locaux insistent : la consigne doit être purement et simplement supprimée.
Consigne du plastique : élus locaux et États membres dos à dos

Afin de réduire le nombre d’emballages mis sur le marché européen, d’augmenter les capacités de réemploi et la qualité des emballages recyclés à horizon 2030, la Commission européenne a proposé, en novembre 2022, un règlement sur le recyclage et le réemploi des emballages (Proposal Packaging and Packaging Waste, PPWR, en anglais).

En novembre 2023, la position des parlementaires européens sur le texte s’est attirée les foudres des élus locaux français pour avoir introduit une consigne des bouteilles en plastique encouragée, disent-ils, « par les lobbies des eaux et boissons dans un intérêt strictement financier ».

Selon eux, et plusieurs associations environnementales, cette « fausse consigne » entrainerait davantage de soucis économiques pour les collectivités locales et d’inconvénients pratiques pour les administrés qu’elle n’aurait d’avantages écologiques.

Le message a été partiellement entendu par les 27 États membres lors de leur dernier conseil « Environnement » de l’année 2023, le 18 décembre. Le ministre de la Transition écologique française, Christophe Béchu, a en effet obtenu de ses 26 homologues un assouplissement de la règle.

Dérogation à la consigne

Le Parlement a proposé de rendre obligatoire, au 1er janvier 2029, un système de consigne pour les bouteilles en plastique et en aluminium d’une capacité maximale de trois litres. L’obligation peut être levée seulement si un État membre justifie d’un taux de tri des bouteilles en plastiques de 90 % en 2026 et 2027.

En conseil « Environnement », M. Béchu a obtenu que cette dérogation puisse être activée dès 78 % de collecte, ce qui est « raisonnablement » atteignable, a confié son cabinet en amont du conseil. Ceci, alors que la loi française contre le gaspillage (AGEC) prévoit déjà un taux de collecte de 77 % d’ici 2025 en France — le taux de collecte aurait atteint 60,3 % en 2022, en léger recul par rapport à 2021 (61,1 %).

« L’allègement de la dérogation est un moindre mal, mais elle ne répond pas totalement à nos attentes », a expliqué Yoann Jacquet, responsable communication d’ « Intercommunalité de France », représentant une grande partie des collectivités territoriales françaises, à Euractiv France.

« Nous demandons toujours l’abandon de cette fausse consigne », a-t-il insisté, déçu, alors que « le ministre [Christophe Béchu] semblait défendre un abandon pur et simple de la consigne du plastique  dans son discours lors des Assises des déchets fin septembre».

Durant ce discours, M. Béchu avait annoncé que le gouvernement ne mettrait pas en place de consigne généralisée à partir du 1er janvier 2024, regrettant toutefois que sa « mise en place […] ne rencontre pas la pleine adhésion dont nous avons besoin aujourd’hui ».

Statu quo écologique

D’un point de vue écologique, les bouteilles en plastique consignées ne pourraient pas être réemployées en raison des règles d’hygiène et seraient donc directement envoyées vers les circuits de recyclage, explique l’association Zero Waste France.

Or, selon l’ONG, cela ne permettrait pas d’atteindre l’objectif du texte européen, c’est-à-dire la réduction de la production des déchets. De plus, le système actuel de tri permet déjà de collecter les bouteilles en plastiques pour recyclage.

« La consigne est un levier auquel nous serions très favorables s’il n’y avait aucun dispositif de collecte pour recyclage déjà existant et efficace. C’est pourtant le cas avec le tri  dans les poubelles jaunes», explique Jean-Yves Daclin, directeur-général France de Plastic Europe, association européenne défendant les intérêts des fabricants de plastique, à Euractiv France.

La mise en place de la consigne pourrait même, « décourager les citoyens d’adhérer au geste de tri unique», plaide l’Intercommunalité de France, alors même que «la bouteille en plastique est l’un des premiers déchets plastiques recyclés », complète M. Jacquet.

Manque à gagner économique

D’un point de vue économique, la consigne du plastique pourrait aussi entraîner un manque à gagner pour les collectivités locales.

Dans le système actuel, l’organisme Citeo touche auprès des metteurs en marché (producteurs de boissons) une redevance pour chaque produit avec emballages mis sur le marché. La redevance est ensuite redistribuée en partie aux collectivités locales pour couvrir jusqu’au trois quarts des coûts bruts des opérations de collecte, tri et traitement des emballages ménagers.

Or, avec la consigne, « il y aurait un transfert des recettes vers les supermarchés et les metteurs sur le marché qui collecteraient les bouteilles, tandis que le coût de la collecte des autres déchets plastiques supporté par les collectivités resterait sensiblement le même  sans les bouteilles en plastique», explique M. Daclin.

Pour l’Intercommunalité de France, il s’agit d’une « double peine» pour les Français : paiement de la consigne et de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères .

En outre, « sans parler des gains réalisés avec les marges sur les taux de retour des consignes, les metteurs en marché vont disposer d’une matière première avec le PET recyclé à des prix très abordables», explique M. Jacquet.

Contre cette situation, les élus locaux et leurs représentants proposent de continuer la simplification du geste de tri et de concentrer les efforts sur le tri hors foyer, c’est-à-dire dans les lieux publics.

Ils pourraient néanmoins se heurter directement à Emmanuel Macron : «selon certains échos,  la consigne est un totem pour le président de la République, car il sait qu’elle jouit d’une grande popularité chez les Français , bien qu’elle soit contre-productive», conclut M. Jacquet.

Source: euractiv.fr

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