Malgré la récente baisse des prix du gaz, le charbon restera plus compétitif que le gaz jusqu’en 2025.
Sans le gaz russe, le charbon revient en force dans l’UE

Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), en Europe, la demande de charbon a augmenté pour la deuxième année consécutive en 2022 grâce à une « forte croissance » de la production d’électricité, où le charbon a partiellement remplacé le gaz comme source d’énergie de sauvegarde (backup energy).

Autrefois éclipsé par le gaz russe, moins cher et moins polluant, le charbon revient à présent en force en Europe pour fournir de l’électricité lorsque des sources décarbonées comme le nucléaire et les énergies renouvelables ne sont pas disponibles.

Et puisque les prix du gaz devraient continuer à fluctuer pendant un certain temps, les vents sont favorables aux producteurs européens d’électricité au charbon, a déclaré un responsable de l’AIE lundi (23 janvier).

« Selon nos prévisions, malgré la récente baisse des prix du gaz, le charbon restera plus compétitif que le gaz jusqu’en 2025 », a déclaré Carlos Fernández Alvarez, qui dirige la division des marchés du gaz, du charbon et de l’électricité de l’AIE.

Selon le rapport 2022 de l’AIE sur le charbon, publié en décembre, la demande croissante de charbon est principalement due à la guerre en Ukraine et à la nécessité de réduire la consommation de gaz à cause de la réduction de l’approvisionnement russe en Europe.

M. Alvarez a déclaré que la demande de charbon en Europe était également poussée à la hausse par le déclin de la production nucléaire en France, Allemagne et Belgique.

« Il y a un vide [dans la capacité de production d’électricité] qui doit être comblé. Et avec les prix élevés du gaz, c’est le charbon » qui comble ce vide, a déclaré l’analyste de l’AIE lors d’une réunion organisée par l’association industrielle Euracoal.

En conséquence, la demande de charbon en Europe devrait augmenter pour la deuxième année consécutive en 2022, a indiqué l’AIE dans son rapport de décembre.

Un phénomène éphémère

Pour beaucoup en Europe, la guerre de la Russie en Ukraine a mis fin à l’hypothèse qui voyait le gaz servir de tremplin pour éliminer progressivement le charbon dans le secteur énergétique.

« L’année dernière, nous avons vu la fin de la notion de gaz comme combustible de transition », a déclaré Radan Kanev, un eurodéputé conservateur bulgare.

Au contraire, « le combustible de transition est le combustible traditionnel », a-t-il ajouté à propos de la demande croissante de charbon l’année dernière pour remplacer le gaz russe.

Cette résurgence du charbon en Europe devrait toutefois être de courte durée.

Alors que l’UE fait pression pour atteindre les objectifs climatiques et parvenir à zéro émission nette d’ici 2050, l’industrie suppose que le charbon aura entièrement disparu du bouquet électrique de l’UE au cours de la prochaine décennie.

« Si l’on y réfléchit bien, cela implique que le secteur de l’électricité doit atteindre le niveau net zéro dès 2035 », a déclaré Roger Miesen de RWE, une compagnie d’électricité allemande. En d’autres termes, la production d’électricité à partir du charbon en Europe devrait être réduite « à presque rien dans les années 2030 », a-t-il expliqué.

Il ne faut pas se concentrer uniquement sur l’élimination progressive du charbon

Toutefois, l’élimination progressive du charbon implique également que les capacités de production d’électricité propre soient développées en parallèle pour le remplacer.

Selon M. Miesen, il s’agit d’un aspect souvent négligé dans le débat public, qui se concentre principalement sur la nécessité d’éliminer progressivement le charbon sans se demander si des alternatives sont disponibles.

« De notre point de vue, c’est le mauvais débat », a-t-il déclaré, ajoutant : « Il est même dangereux de faire cela, car vous pourriez avoir des problèmes de sécurité d’approvisionnement ».

« Le bon débat est de savoir comment mettre en place les alternatives. Lorsque les alternatives seront en place, le charbon disparaitra de toute façon », a-t-il déclaré. Mais si les alternatives ne sont pas développées assez rapidement, la transition énergétique pourrait tout simplement « ne pas avoir lieu », a-t-il mis en garde.

Une autre question essentielle est de savoir si le charbon sera nécessaire pour fournir ce que l’on appelle des « services auxiliaires » au réseau électrique, par exemple pour remplacer les énergies renouvelables lorsqu’elles ne sont pas disponibles.

« Ces services ne seront pas un sous-produit ; quelqu’un doit garantir qu’ils soient fournis, sinon nous nous retrouverons en panne d’électricité », a déclaré M. Alvarez.

Dans ce contexte, le secrétaire général d’Euracoal, Brian Ricketts, a mis en garde contre les pressions exercées par l’industrie gazière en vue d’obtenir des subventions gouvernementales pour la construction de nouvelles centrales à gaz destinées à pallier les énergies renouvelables.

« Les compagnies de gaz demandent des subventions pour construire ces centrales », ce qui est « absolument étonnant » étant donné la volatilité géopolitique actuelle du gaz, a déclaré M. Ricketts à EURACTIV.

Une option moins coûteuse, selon lui, serait d’utiliser des centrales à charbon, qui sont déjà disponibles et ne nécessitent pas de nouveaux investissements.

Source: euractiv.fr

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