La jeune filière du photovoltaïque s’implante progressivement dans les parcelles agricoles. Dans un rapport inédit, l’ADEME propose une évaluation et une clarification des différents modèles possibles nécessaires à la transition énergétique.
Concilier agriculture et production énergétique : les promesses du photovoltaïque

Lors de la présentation de la stratégie Energie 2050 à Belfort en février dernier, Emmanuel Macron présentait l’agrivoltaïsme comme l’un des piliers de la stratégie solaire française.

Le secteur de l’énergie solaire est, en effet, très attendu dans le cadre de transition énergétique. Pour parvenir à ses objectifs, la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prévoit de multiplier par quatre ou cinq les capacités photovoltaïques de la France.

« Le développement du photovoltaïque dans les exploitations agricoles contribue largement à l’atteinte de l’objectif de 40 % d’énergies renouvelables dans la production d’électricité d’ici 2030 » explique l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) dans un rapport sur le sujet publié le 27 avril dernier.

Manque de cadre réglementaire

Depuis plusieurs mois, l’agrivoltaïsme est devenu la figure de proue de l’innovation agricole. Le 4 janvier dernier, le Sénat a voté une résolution encourageant son développement. Un mois plus tard, c’est au tour d’une mission-éclair de l’Assemblée Nationale de conclure que « le développement de l’agrivoltaïsme peut apporter des solutions concrètes et rapides à une série de défis auxquels la France et le monde agricole sont livrés. »

En revanche, les rapports parlementaires pointent l’absence de cadres réglementaires et de définitions juridiques de ces pratiques, engendrant des dérives dénoncées par les associations environnementales, notamment un empiétement des structures voltaïques sur les terres agricoles et des conflits d’usage.

« L’agrivoltaïsme peut constituer une menace s’il n’est pas précisément encadré, si son développement est anarchique » expliquait Julien Denormandie lors de son allocution au Sénat le 4 janvier dernier.

Définition de l’agrivoltaïsme et « couplage d’intérêt pour l’agriculture »

La publication de l’ADEME était donc très attendue par le secteur.

Après analyse de la littérature existante et étude d’une cinquantaine de fermes photovoltaïques, l’agence propose pour la première fois des critères d’évaluations, basés sur « les services apportés par le projet photovoltaïque à la production agricole, son incidence sur cette production et son incidence sur les revenus de l’exploitation ».

Ainsi, lorsqu’il y a « synergie » complète entre les deux types de production, sur une même surface de parcelle, on peut alors parler d’agrivoltaïsme. Cela se matérialise par des structures photovoltaïques sur des espaces cultivés ou pâturés.

Des panneaux solaires au-dessus d’une production végétale permettant de protéger d’un ensoleillement excessif par exemple ou offrant un abri contre le gel ou la grêle : « il y a une vraie valeur ajoutée, souligne à EURACTIV Stéphanie-Anne Pinet, déléguée générale de France Agrivoltaïsme, une association créée en 2021 visant à soutenir les acteurs de cette nouvelle filière.

« Le principe, c’est que la production d’électricité soit secondaire. L’agriculture est prioritaire dans l’agrovoltaïsme » poursuit-elle.

Pour l’ADEME, l’installation doit clairement apporter un service en réponse à une problématique agricole, et cela « sans induire ni dégradation importante de la production agricole […] ni diminution des revenus issus de la production agricole. »

Cette configuration à double bénéfice peut, selon l’étude de l’ADEME, être accompagnée d’autres systèmes moins exigeants, mais équilibrés dits de « couplage d’intérêt pour l’agriculture ».

L’agence donne l’exemple d’un agriculteur qui accède à une serre photovoltaïque qui n’impacte pas la production agricole, sans pour autant en tirer de bénéfices agronomiques particuliers. Cet accès à des moyens techniques, offrent ainsi « de nouvelles opportunités pour les exploitations agricoles ».

Evaluation au cas par cas

L’ADEME reconnaît toutefois qu’il est impossible d’établir des critères précis, l’agrivoltaïsme et les autres modèles devant être évalués « au cas par cas ».

L’étude a en effet montré que les rendements des cultures sous structure photovoltaïque dépendent de nombreux facteurs comme les conditions pédoclimatiques (conditions de climat auquel est soumis un sol), les espèces cultivées ou encore des caractéristiques des structures (taux de couverture, orientation des panneaux, hauteur…)

D’autres critères doivent également être pris en compte pour l’ADEME, comme l’inscription dans une « dynamique territoriale » ou le maintien de la qualité des sols.

Cette première étude à l’échelle nationale vise in fine à améliorer l’information des porteurs de projet, afin de les inciter à se lancer dans ces initiatives innovantes qui pourraient, selon l’agence, « contribuer à rattraper le retard de la France dans ses objectifs de développement des énergies renouvelables »

La prochaine étape ? « La construction d’un cadre réglementaire et normatif, qui devra suivre deux objectifs : simplifier les procédures tout en garantissant un cadre protecteur pour l’agriculture et les agriculteurs » confie Stéphanie-Anne Pinet de France Agrivoltaïsme.

Selon l’association, en 2050, la France pourrait produire en agrivoltaïsme 80 gigawatts sur les 120 de production solaire annoncés par Emmanuel Macron à Belfort.

Source: euractiv.fr

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