Découvrez notre interview de Vincent Dubail, Membre du CF EELV et ingénieur d’État au ministère de la Transition écologique et solidaire.
Tired Earth : La courte interview de Vincent Dubail, membre du CF EELV

Cette interview a été réalisée par Brice Garreau
Photo éditée : ©Tired Earth France

 

Pourquoi avez-vous choisi écotopie dans votre livre ?

J’ai écrit le livre « Kit pour voyager en écotopie » juste avant la pandémie du Covid. A ce moment, il m’a semblé absolument crucial de réactiver et réhabiliter le terme d’utopie en le tordant légèrement pour en faire un terme adapté pour notre époque. Je dis réactiver et réhabiliter parce que, la confrontation du réelle est si dure à supporter pour une partie non négligeable des personnes vivant en France, qu’ils en viennent à vouloir tuer toute idée d’espoir. Ce que je comprends. Nous sommes abreuvés de mauvaises nouvelles à longueur de journée. Le besoin se fixe dans le maintenant et non dans le demain. Le pire se passe sous nos yeux et les solutions se doivent d’être concrète et réalisable rapidement. Ce refus de l’ecotopie vient aussi dans une forme de « fin de l’histoire » notamment des utopies à partir du XIX siècle. Les partis politiques n’ont pas su incarner un renouvellement des idées que ce soit la nouvelle droite ou la sociale démocratie comme le marxisme qui sont dépassés depuis longtemps. Il n’y avait plus besoin de nouvelles idées, la redistribution de la croissance permettait à chacun d’avoir suffisamment pour voir sa vie s’améliorer. 

Et puis enfin le terme utopie a depuis sa naissance été décrié et les personnes qui osaient s’en revendiquer, n’étaient pas pris aux sérieux. Elles étaient perçues comme des rêveuses. Du moins ça c’était avant le Covid. Le statut quo a volé en éclat. Je crois que l’opinion a un peu changé sur ce point. Ce qu’on a considéré longtemps comme impossible est devenue possible. Dans le pire comme dans le meilleur, les morts brutales d’un côté, l’incroyable solidarité de l’autres, les grandes entreprises qui se sont repus sur le dos des premiers de cordé, les milliards qu’on a pu sortir pour lancer de grands plan alors que le mantra général était aux régimes d’austérité. Et le slogan du « monde d’après » prolifique lors du confinement, mais qui s’est tari, marque cette idée. Maintenant nous sommes à un carrefour, à la croisée des chemins et nous devons choisir entre une écotopie, c’est-à-dire une utopie progressiste qui pense le future ou bien s’enfermer dans des idéologies conservatrices qui pensent le présent en détruisant l’idée d’avenir. C’est pour cela que je me suis lancé dans l’idée d’une écotopie, pour réactiver notre imaginaire pour penser le demain en revenant à la racine des problèmes mais en proposant des mesures réalisables.

Les mesures nécessaires ont-elles été prises pour faire de la ville de Puteaux une écotopie ?

Malheureusement non. Et nous en sommes très loin. En même temps, faut-il espérer quoi que soit des élus à droite de l’échiquier politique qui dirigent la mairie depuis plus de 50 ans. Ils ont été nourris au productivisme et au consumérisme. Chaque décision prise reflète cette logique. Quand il faudrait déconstruire pour ouvrir des parcs et jardins en pleine terre, ils urbanisent en regardant combien la plus-value foncière va leur rapporter. Quand il faudrait planter des arbres sur les places de parking, ils coupent des arbres qui apportaient un peu fraicheur dans un monde en proie aux flammes.

On ne demande pas à son fossoyeur les solutions pour résoudre les problèmes. Il y aura tant à faire. Ce qui est le plus dure, c’est de savoir que nous avons les moyens humains et financiers d’agir en faveur d’une société désirable mais de ne pas pouvoir faire trop peu en faveur d’une amélioration de la qualité de vie du vivant humain et non humain.

Election présidentielle : Comment évaluez-vous la présence de M. Yannick Jadot ?

La société à un désir d’écologie. Les différentes enquêtes le montrent à chaque fois. La dernière en date de Ipsos « fracture » montre de très forte préoccupation sur les sujets qui touchent à l’environnement et au climat. Yannick Jadot par sa posture et ses propositions incarne le changement possible vers une république écologique. Il est une figure capable de transfigurer la société. La sortir d’elle-même pour refaire du commun. Même si le terme d’archipel peut porter à confusion, je suis assez d’accord avec ce que dit Jerome Fourquet, la société s’archipellise, il n’y a plus de liants observable qui font tenir la société. L’écologie dans son universalisme et humanisme est un moyen pour refaire société, en se donnant un objectif, un but à atteindre qui refait du lien et du liant.

Yannick Jadot est le seul candidat qui peut rassembler des partenaires et alliés avec qui les écologistes travaillent habituellement. Mais surtout il est en capacité de rassembler les français. D’ailleurs les sondages le prouvent. Il est régulièrement en tête. La victoire est possible, même si elle semble difficile à percevoir actuellement dans le match politique avec plus de 5 candidats qui se revendiquent de l’écologie et puis entre d’une coté marine le Pen et de l’autre Macron à plus de 20 %. Difficile mais faisable. Il faudra que le PS comme le PC reviennent à la raison. Le paysage politique des candidatures finira par se décanter et puis entre ceux qui veulent être candidats et ceux qui peuvent réellement le faire, il y a un grand écart. Le sésame des 500 parrainages reste un défi pour la majorité des candidatures. De plus, beaucoup ne se retrouvent pas dans les parties et attendent pour le moment de voir émerger une candidature pour s’engager. Donc gardons espoir, le temps de l’écologie est venu.

Comment évaluez-vous les mesures prises par le gouvernement pour protéger l’environnement ?

Décevante et timide. On navigue entre renoncement et colère. Ce qui me choque le plus est cette collusion avec les lobbies. Si le devoir d’un président est d’être à l’écoute, aucunement il ne se doit d’être le porte-parole des intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général. Dans le langage courant, on appelle ça du clientélisme. On le voit facilement, que ce soit les chasseurs, les deux roues, les grandes fortunes. Comme toujours, la France n’en sort pas grandie et puis c’est au détriment de la planète et du climat. Prenons le sujet de la biodiversité, il y a quelques semaines nous avons le congrès mondial de la nature UICN, presque aucune annonce, alors que nous vivons la sixième extinction des espèces. Nous aurions pu proposer la mise en place d’espace en libre évolution, l’extension des réserves qui ne recouvrent moins de 2 % de notre territoire pour atteindre l’objectif de 10 % en 2030, le lancement de programmes fort de restauration et renaturation pour montrer l’exemple aux autres pays. Au lieu de ça, nous avons le gouvernement qui a mis mercredi 15 septembre plusieurs arrêtés en consultation pour permettre d’autoriser la réouverture des chasses traditionnelles d’oiseaux alors qu’une décision du Conseil d'Etat comme de l’Europe jugent plusieurs de ces techniques de chasse illégales. Si la chasse n’est pas la seule responsable du déclin des oiseaux du en majorité à l’artificialisation, elle y contribue pour partie. Comment proposer une société plus apaisé si le premier chose qu’on fait c’est autoriser la souffrance animale avec des méthodes barbares et non sélectives. Je ne parle pas des néonicotinoïdes, du piétinement de la loi climat. Enfin les exemples sont légions. Face à un monde en déliquescence et d’un politique qui n’agit pas, la jeunesse souffre d’une très grande écoanxieté avec de nombreux troubles sur la santé mentale. Macron est à mon sens responsable, il accentue les crises d’angoisse. Nous voyons l’horloge qui passe, conscient que chaque jour c’est du temps qu’on nous enlevé pour réussir à maintenir notre planète habitable. 

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